Edito : Mars 2014
Le printemps corse
L’ile est dans l’expectative. Elle ploie sous l’inquiétude, mais espère un futur plus serein. Cet étrange mélange qui forge désormais l’opinion est le signe patent d’une mutation sociétale. La Corse serait-elle à la croisée des chemins ? Vraisemblablement. La population qui affiche un réel scepticisme, veut toutefois croire à une salutaire éclaircie. Après la pluie vient le soleil. L’adage est connu et nombreux sont ceux qui voudraient qu’il ne s’applique pas exclusivement à la météorologie. De manière diffuse ou explicite, l’idée du salutaire sursaut se répand. Le constat, cruel et implacable, sculpte une région à la dérive. Sans repères ni lisibilité. Le terme de bateau ivre ne parait pas usurpé, concernant une région sans cesse ballottée. Au cap incertain et naviguant a vue. Depuis quelque temps cependant elle semble croiser dans des eaux moins agitées. Simple parenthèse avant un nouveau coup de tabac ou bien prémices d’une réelle accalmie ? Et si, enfin, la tempête s’éloignait dans le sillage d’une destination nouvelle ? Certes, l’optimisme béat ne doit pas fermer l’écoutille de la réalité. Elle recèle en effets désastreux mal vivre, jeunesse déboussolée, nouveaux pauvres, violence et drogue. Ce tableau, aussi terrible soit-il, noirci jusqu’à la nausée, laisse pourtant filtrer une mince lueur aux traits de l’embellie. Il ne s’agit nullement d’une illusion d’optique, ni d’un signe de la providence. Dans ce clair-obscur perce une promesse d’avenir. Devant le précipice et l’indicible danger, des voix s’élèvent pour alerter. Ils ne se répandant pas dans les médias, bannissent les grandes théories livresques, ignorent les préceptes éculés dont sont friands tant de faux moralistes. Aux antipodes de ces élucubrations ces hommes de bien évoquent simplement leur vécu, disent l’investissement qui fait leur quotidien. Créent des petites entreprises, font preuve d’initiative. Bref, ils montrent par l’exemple qu’autre chose est possible. En cela ils sont précurseurs car au-delà de leurs engagements respectifs, s’esquisse la démonstration d’une confiance renouvelée en cette Corse qu’ils aspirent à reconstruire. Délaissant le magistère de la parole, ils apportent leur pierre à l’édifice et se veulent en incidence une authentique force d’entrainement.
Cette évolution des esprits, initiée à maints égards par les nouvelles générations sera bien évidemment décriée par les Cassandre qui retirés sur leur Aventin ne savent que flétrir ou pourfendre. Laissons-les à leurs stériles dénigrements. Observons plutôt avec empathie, ceux qui mettent leurs pas dans cette évolution créatrice chère à Bergson. Contre vents et marées ils font œuvre constructive. Leur action vaut mieux que longues tirades. Elle est l’éclatant message que la Corse qui gagne ne doit pas demeurer un éternel vœu pieu.
Vous avez dit printemps corse ?
Jean Poletti
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