Dessine-moi une bonne année
Par Jean Poletti
Une année bonne et l’autre non chantait Ferrat. La Corse a l’aube de chaque changement de calendrier conjugue craintes et espoirs. Comme si le temps écoulé s’arrêtait net pour laisser place à une nouvelle ère. Inconnue, venue du néant et aux perspectives insondables.
Notre ile rêve depuis des lustres à un destin plus favorable. Ployant sous les assauts de la précarité. Malmenée par une économie exsangue. Soumise au doute du lendemain. Voilà les trois réalités qui jettent une vaste ombre au tableau de ceux qui contre vents et marées tentent encore de faire croire à une vie en rose.
Inévitablement, l’inconscient collectif s’accroche à l’idée d’un futur meilleur. Sentiment diffus et irrationnel ? Sans doute. Dans une sorte de méthode Coué, les gens veulent malgré tout croire que le pire ne sera jamais sûr. Des raisons d’espérer existent. Il suffit de les mettre en synergie et d’en finir enfin avec ces forces d’inertie et autres combats d’arrière-garde qui clouent depuis trop longtemps un peuple au pilori.
Concrétiser les multiples potentialités. Dire que l’une des régions les plus belles du monde n’a pas vocation au calvaire. En finir avec le défaitisme ou confondre allègrement le possible du souhaitable. Voilà sans doute un panel de considérations dictées par l’élémentaire bon sens. Et valant promesse de succès collectif.
A contrario, persévérer dans les chimères, outrances et nombrilisme équivaudra, demain, comme naguère a illustrer le fameux slogan : sous le soleil, la misère.
Durant trop longtemps les bateleurs d’estrade et autres spécialistes autoproclamés firent croire, sinon que tout allait bien, du moins que le bout du tunnel était perceptible. Adeptes des formules creuses ou comme l’on dit actuellement d’éléments de langage, ces diseurs de bonne aventure se paraient des atours de sauveurs et de guides. Le peuple n’entend plus ces propos lénifiants. Dans sa grande sagesse il a désormais pris l’habitude de chasser par les urnes ceux qui trompent, déçoivent ou confondent mandats électifs et rentes. La dernière territoriale en fut un exemple probant. Dans le droit fil des municipales, ou des idoles chutèrent de leur piédestal.
Les attentes sont fortes. L’exigence affichée. Les habitants n’ont cure de grands discours ou promesses de Gascons. Persuadés que leur région n’a pas vocation à demeurer lanterne rouge ils ne veulent plus tirer le diable par la queue. Tout simplement.
La Corse, est à la croisée des chemins. Cette formule, aussi galvaudée soit-elle, doit actuellement être impérativement employée en regard du marasme ambiant. Le sursaut ? Il est promis depuis longtemps. Mais demeure au stade de vœu pieu. Jusqu’à quand ? La nouvelle équipe au pouvoir s’évertue à faire bouger les lignes et les choses. Mais la tâche est ardue. L’héritage s’avère lourd et les obstacles nombreux.
Du retard qualifié d’historique, à l’épilogue souhaité, le parcours ne s’apparentera pas à un long fleuve tranquille. D’autant que la plausible alternance Elyséenne permet en incidence aux actuels opposants insulaires de fourbir leurs armes.
Tout est lié. Les problématiques factuelles se fondent dans un malaise général qui brise le lien social et renvoie aux calendes grecques le concept du vivre-ensemble, il est vrai mis à toutes les sauces.
La Corse a-t-elle droit au bonheur ? Voilà finalement la seule interrogation qui vaille d’être posée en cette année naissante. Et si cette fois il ne s’agissait pas d’une chimère, nul doute que le traditionnel Pace e salute aurait l’accent du renouveau.
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