Il est l’un des artistes français les plus cotés du moment. Connu pour ses visages et ses corps monumentaux empreints de réalisme, sa peinture figurative parvient à exprimer toute la fragilité des êtres. Une attirance pour la vulnérabilité qui se retrouve dans l’ensemble de son œuvre et laisse deviner son extrême sensibilité.
Par Karine Casalta
La chair a longtemps été un de ses thèmes de prédilection. Il reconnaît volontiers en avoir été un moment obsédé. Une chair tourmentée qu’il livre au travers de ses toiles dans une vérité presque dérangeante, où la couleur, très présente, et l’épaisseur de la matière, s’emploient à en accentuer le réalisme et lui donner sa vitalité. Souvent inspiré par sa famille, sa mère notamment, jusqu’à, de manière plus inattendue, son oncle Charles, il a beaucoup peint les hommes et les femmes qui l’entourent. Mais ses œuvres picturales présentent aussi des personnages, des gens fragiles et à part, croisés au fil de rencontres, qui l’ont interpellé pour leur différence et ont attiré l’artiste à fleur de peau. «Il faut que je ressente les gens pour avoir envie de les peindre. » Trisomiques, aveugles, prostitués ou encore transsexuels, leur marginalité résonne en lui. Une attraction pour la différence, exprimée vigoureusement par le format souvent monumental de ses œuvres. Car derrière ces personnages, l’artiste se devine « je mets beau- coup de moi-même dans chaque tableau. Même si ce n’est pas moi qui suis représenté, chacun est un peu un autoportrait ».
La nécessité de peindre
C’est à l’âge de 18 ans qu’il commence à peindre, après un choc émotionnel très fort ressenti à la vue d’un tableau de Francis Bacon, en photo sur un livre, dans une vitrine. « J’ai été foudroyé ! Ce tableau m’a immédiatement interpellé ! À partir de ce moment-là est né le besoin d’exprimer mes émotions sur la toile, c’est devenu pour moi une nécessité. » Jusque-là sans intérêt particulier pour l’univers artistique, c’est en autodidacte qu’il s’en- gage alors sur cette voie, en y consacrant la totalité de son temps et de son énergie. « La peinture est devenue une façon de vivre, une sorte de thérapie. » Il s’y plonge corps et âme. Et c’est une quinzaine d’années plus tard qu’arrivent ses premiers succès, et ses œuvres vont dès lors s’arracher à prix d’or sur le marché international de l’art. Poursuivant son cheminement artistique, c’est à la sculpture que l’artiste se consacre depuis quelques années. Après avoir largement ouvert les portes du Storage, plateforme de travail expérimentale, à la fois atelier et lieux d’exposition et de stockage, situé à Saint- Ouen-L’Aumône, c’est au cœur de la nature, près de Lisbonne que Philippe Pasqua a installé son nouvel atelier où il travaille ses œuvres en alumi- nium ou bronze chromé « en écoutant le silence ».
Un thème récurrent
Paradoxalement, si la chair était au cœur de ses tableaux, c’est essentiellement la structure des corps et leur ossature, que ses sculptures laissent à montrer. De ses séries de crânes d’où s’échappe comme un semblant d’âme une envolée de papillons, au squelette colossal de son T-Rex, ses œuvres mettent cependant toujours en relief la vulnérabilité et la fugacité de la vie. Une réflexion presque philosophique sur les êtres qui, grands ou misérables, sont finalement tous voués à dispa- raître. Considéré aujourd’hui comme une pointure de l’art contemporain, l’artiste régulièrement exposé en France et à l’étranger ne manque pas de projets. Il sera très prochainement mis à l’hon- neur dans le cadre du Musée océanographique de Monaco, pour une exposition de grande ampleur sur le thème de la défense des océans, avec l’écologie en fil conducteur, qu’il prépare avec enthousiasme. Un nouvel univers et de nouvelles fragilités à explorer.
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