Avec un physique qui n’est pas sans rappeler Whitney Houston et un timbre naturel au charme troublant, Emily Johnson a l’art de faire vibrer les mélodies jazzy. Auteure, compositrice et interprète, l’artiste multiculturelle, qui vit désormais en Corse, prépare actuellement l’enregistrement de son prochain album. Un nouvel opus aux couleurs acid jazz avec lequel elle compte bien nous embarquer dans l’intimité de son univers musical empreint d’émotion.
Par Karine Casalta
Issue d’une famille cosmopolite, Emily a grandi en Bulgarie entre un père avocat d’affaires internationales d’origine nigérienne élevé à Londres et une mère bulgare électricienne. Un univers loin de la scène et du monde artistique. Et un métissage qui lui vaut, dans la Bulgarie communiste de son enfance de se sentir différente des autres enfants de son âge. Ce qui la pousse sans doute dès le plus jeune âge à trouver sa place en cherchant à se faire remarquer « J’étais un peu le clown de la famille, sans cesse en mouvement, je ne tenais pas en place. J’aimais danser, chanter devant la famille, les amis… » Et si c’est plutôt la danse qu’elle pratique alors avec assiduité, la musique fait aussi déjà partie de sa vie. La petite fille est imprégnée des rythmes de Boney M., de d’Earth Wind & Fire, et de bien d’autres musiques américaines qu’on écoutait chez elle, à l’encontre de l’orthodoxie culturelle qui régnait dans le pays.
L’appel de la scène
C’est dans ce foisonnement musical anglo-saxon qu’elle découvre un jour Michael Jackson, et l’album « Thriller », qui sera pour elle une véritable révélation. « Le chant, la danse, la couleur de peau… Michael Jackson a tout de suite représenté pour moi un repère. C’est réellement lui qui m’a donné envie d’être un jour sur scène. » De fait, après des études de danse et de cinéma, elle intègre quelques années plus tard la troupe « Diva Dance » le plus grand ballet du pays. S’en suivront alors de multiples expériences dans la publicité, le cinéma, le théâtre et la télévision où elle anime une émission sur le 7e art. Devenue une sorte de « star » locale, cette image ne la satisfaisait pourtant pas et elle a du mal à trouver sa place dans cet environnement où elle se sent à l’étroit et se heurte régulièrement aux limites posées par la couleur de sa peau. Décidée à prendre en main sa destinée et de tenter sa chance à l’étranger, elle va alors choisir la France pour poursuivre sa carrière avec d’autres ambitions. Débarquée sur la Côte d’Azur pour se produire en duo avec une amie, c’est là que peu à peu l’idée de faire carrière dans la musique va s’imposer.
De belles rencontres
Mais pas à n’importe quel prix cependant, car l’artiste est éprise de sincérité et ne veut pas se renier pour y arriver. C’est ainsi qu’elle renoncera à un contrat avec la Star Academy qui l’avait retenue pour ne pas perdre sa liberté. Une heureuse rencontre avec le chanteur américain Fat Cat Hackett, qui se produit régulièrement dans la région, va cependant lui ouvrir des portes et l’aider à travailler. « Ça a été une chance pour moi de le rencontrer. Professionnellement, il m’a fait grandir et progresser. Il m’a entre autres appris à gérer ma présence seule sur scène et à entraîner le public. » Travailleuse acharnée, elle commence alors à se produire régulièrement devant le public pour des concerts et des galas privés, ce qui la conduira quelques années plus tard à monter sa propre société « Events With Joy ». Des prestations qui lui offrent aussi de proposer ses propres chansons qu’elle se plaît à écrire et composer, dans un univers musical inspiré d’artistes comme Whitney Houston, Mickael Jackson, Stevie Wonder, Gregory Porter, ou encore le groupe Incognito. Et c’est à l’occasion d’une de ces prestations, que les bonnes fées du jazz, de la soul et du R’n’B vont une nouvelle fois se pencher sur son destin, plaçant sur sa route le guitariste anglais John McLaughlin, une légende dans le monde de la musique ! Le musicien, qui a joué aux côtés de Bowie, des Rolling Stones, de Carlos Santana, Miles Davis ou encore Jeff Beck, a en effet brillé au firmament du jazz-rock, et écrit quelques-unes des plus belles pages de la world music avec Mahavishnu Orchestra et Shakti, les deux groupes qu’il a fondés. Totalement séduit par sa voix et par l’émotion qu’elle sait susciter, il va très vite la prendre sous son aile. C’est alors qu’avec lui, tout va alors s’accélérer…
Le premier album
Jugeant le talent d’Emily hors du commun, il va œuvrer à la propulser sur le devant de la scène, lui offrant de partager les spotlights d’un grand gala de charité monégasque.
Mais surtout, il va la faire partir aux USA pour rencontrer Narada Michael Walden, sûr que son ancien batteur au sein du Mahavishnu Orchestra, devenu depuis l’un des grands producteurs américains, pourra lui faire franchir un cap. En effet, compositeur et producteur américain, Narada a travaillé aux côtés de Diana Ross, Aretha Franklin, Sister Sledge, Mariah Carey, Al Jarreau et, surtout, Whitney Houston dont il fut l’un des principaux producteurs. « Lorsque j’ai débarqué dans ses studios, raconte Emily, j’ai cru m’évanouir devant les murs tapissés des disques d’or de célébrités que j’admirais depuis toujours. J’ai fondu en larmes tellement il me paraissait incroyable d’être là ! »
Elle enregistrera ainsi son premier album « Open Your Heart » qui tire son nom du titre phare de l’album, une chanson qu’elle avait écrite en 2007 que Narada va mettre en musique. Un titre qui parle de guerre, de racisme et de haine, pour porter des valeurs qui la touchent. « J’ai moi-même souffert de discriminations, et c’est important pour moi de faire passer un message d’espoir, de tolérance et de paix. »
Rester fidèle à ses aspirations
L’album sorti en 2018 dans le monde entier propose ainsi plusieurs titres composés par Narada, auxquels s’ajoutent des morceaux plus personnels, joués et arrangés par de grands professionnels des studios d’Outre-Atlantique. « J’ai été impressionnée par le travail, l’efficacité et la rapidité de sa mise en œuvre », dit-elle. Marketé par cette industrie du disque à l’américaine, cela donnera un album à la couleur très saoul et R’n’B, qui s’éloigne toutefois du répertoire jazz et acid jazz vers lequel l’artiste tend plus naturellement. Car c’est dans le monde du jazz que la chanteuse souhaite trouver sa place, désireuse de rester fidèle à sa personnalité. Profondément sincère, elle refuse de sacrifier sa carrière de chanteuse de jazz au profit d’une autre plus commerciale.
Et c’est bien ce vers quoi elle tend aujourd’hui avec son nouvel album en préparation, dont elle signe paroles et musiques, qu’elle partira enregistrer à Détroit au début de l’année. En incubation depuis plusieurs mois mais mis en pause en raison de la crise du Covid, l’album devrait sortir au mois de mai prochain.
Toujours animée d’une fervente passion pour la musique, elle continue aussi à se produire régulièrement sur les scènes de festivals comme : Jazz à Juan, Jammin’, Cannizzaro, Saint-Raphaël et Red Sea Jazz Festival, soit à l’occasion d’événements privés d’envergure, où elle se donne à son public avec une rare générosité et sincérité qui la caractérisent.
Un engagement sans retenue pour donner toujours plus d’émotions au détour de ses notes et de ses mots.
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