Jean-Louis Albertini : un intérêt particulier à un intérêt général
En janvier 2022, Jean-Louis Albertini prend la présidence du Medef Corse. Âgé de 42 ans, le directeur général du groupe « L’Olivier Bleu » milite pour l’intérêt général et la cause publique depuis longtemps et les nombreuses charges qu’il occupe ont toutes comme dénominateur commun l’économie. Familier du monde de l’entreprise insulaire, il est conscient des défis à relever pour concevoir un nouveau modèle économique. Portrait.
Par Anne-Catherine Mendez
Parlez-nous de votre parcours :
Mon parcours est assez linéaire. J’ai accompli toute ma scolarité à Bastia jusqu’à l’obtention de mon Bac S et j’ai décidé de poursuivre mes études à la faculté de Droit d’Aix-en-Provence d’où je sors diplômé en 2004. Àl’époque, je n’avais pas d’idées très précises de ce que je voulais construire dans ma vie et m’orientais vers plusieurs choix, mais aucun n’était rattaché au monde de l’entreprise. J’ai eu, à ce moment-là, l’opportunité de partir en voyage linguistique en Australie pendant près d’un an. C’est à mon retour en Corse que je m’investis totalement dans la construction de notre groupe familial « L’Olivier Bleu » qui est orienté principalement dans la prise en charge des personnes âgées dépendantes ou non et des services associés.
Comment êtes-vous parvenu à la présidence du Medef ?
Je connais bien l’organisation patronale. J’ai adhéré dès 2013 au Medef de Corse et me suis impliqué très rapidement dans la vie du mouvement en devenant mandataire de notre organisation au sein du Conseil d’administration de l’ARACT de Corse (structure associative paritaire qui assure la promotion des actions de prévention des accidents de travail et maladies professionnelles, ainsi que l’amélioration des conditions de travail des salariés) dont je deviens président en 2016 mais également dans d’autres mandats. J’intègre par ailleurs le Conseil d’administration du Medef de Corse dès 2015. Mon élection en 2022 à la présidence de notre mouvement a été le fruit d’un large consensus et de l’alternance de présidence entre la Haute-Corse et la Corse-du-Sud. Par ailleurs, je suis très investi dans la vie économique locale et œuvre modestement à l’intérêt général avec comme fil rouge le bien commun et le rôle social et sociétal fort que joue l’entreprise puisque je suis également juge au Tribunal de commerce d’Ajaccio mais aussi membre de la CCI régionale. Depuis 2023, j’ai intégré les bureaux de deux Commissions nationales du Medef.
En Corse, que représente le Medef dans le paysage économique ?
Le Medef de Corse est fortement représentatif du paysage économique local puisque nous comptons près de 700 entreprises adhérentes directes et par les branches. Il s’agit d’une organisation patronale interprofessionnelle. Les entreprises que nous couvrons emploient entre le quart et le tiers de l’emploi salarié privé en Corse (hors agriculture). Nous comptons également près de 200 mandataires répartis sur plus de 50 organismes. Tous les secteurs d’activités présents en région sont représentés au sein de notre organisation. Nous devons rassembler et défendre nos intérêts.
Quelles sont ses grandes missions ?
Dans les grandes lignes le Medef à deux vocations principales. La première est économique et a pour objet la défense des intérêts économiques des entreprises. La deuxième est sociale et a pour mission principale de participer au dialogue social. Nous avons donc une dimension économique et sociale que nous jouons pleinement sur notre territoire. Nos mandataires sont fortement investis et mobilisés au sein des organismes où nous siégeons (CESEC, Santé au Travail, URSSAF, CPAM, CAF, Conseil des Prud’hommes, Pôle Social, CREFOP…). Nous nous exprimons au nom de toutes les entreprises que nous représentons, des plus petites aux plus grandes, et dans des secteurs d’activités très variés pour être à la fois force de propositions auprès des pouvoirs publics mais également au plus proche des préoccupations des chefs d’entreprises. Je suis un porte-parole. Par ailleurs, nous accompagnons aussi les entreprises dans leur croissance : droit du travail, fiscalité, environnement, emploi des jeunes, formation.
Aujourd’hui, vous avez de nombreux projets pour dynamiser l’organisation patronale que vous représentez, quels sont-ils ?
Nous avons créé dès 2022 avec le bureau de notre organisation et en accord avec le Conseil d’administration des commissions thématiques nécessaires à la technicité et aux enjeux des débats actuels (Transport, Compétence-Emploi, Développement économique, Tourisme, Développement durable et Transition écologique, Langue et culture). Nous avons également mis en place des référents mandats pour être encore plus proche de nos adhérents et nous continuons de participer activement aux réunions d’instances diverses auxquelles nous sommes conviés. Nous travaillons également actuellement avec toutes nos forces vives et au-delà à formaliser des propositions conjoncturelles et structurelles afin d’aider le tissu entrepreneurial à se protéger, se renforcer, se développer mais aussi et surtout l’aider aux transformations nécessaires pour le diversifier et ainsi le transmettre dans des conditions optimales. La période qui s’annonce oblige les entreprises insulaires d’être fortes, compétitives et structurées. Nous souhaitons continuer à positionner les entreprises insulaires comme des créateurs de richesses collectives, d’emplois stables. Mais nous ne pourrons aborder cette étape en position de fragilité car cela conduirait à un échec collectif.
Quel est le moral des chefs d’entreprises corses ?
Les chefs d’entreprises sont des battants extrêmement résilients mais il faut avouer que subsistent encore trop d’incertitudes à la fois fiscales et règlementaires. Il est quasiment impossible dans ce contexte d’avoir une vision prospective de nos entreprises. L’année 2023 n’a pas été une sinécure et rien ne laisse présager une amélioration en 2024. Malgré tout, nous continuons de tenir la barre de nos entreprises et soutenons l’emploi, la formation, le logement et la croissance dans un développement maîtrisé, responsable et durable.
Pensez-vous que vous êtes assez entendu dans le paysage politique ?
Nous sommes reçus régulièrement ou à notre demande par les services de l’État organisés et par monsieur le préfet lui-même tout autant que par les services de la Collectivité de Corse et du président du Conseil Exécutif ou de l’ADEC. Cependant, il existe un décalage entre le besoin identifié par nos adhérents et la prise de décision qui apporte la réponse à ce besoin. Il en est de même sur les grandes orientations à prendre ou les virages à anticiper et parfois c’est trop tard. Il est important de pouvoir bénéficier d’un outil spécifique qui analyserait les mutations économiques et qui viendrait compléter les données actuelles fournies par la Banque de France ou l’INSEE par exemple au-delà du constat de l’instant que nous faisons tous et qui est surtout dépassé en termes de décisions adaptées.
Vous-même qu’est-ce qui vous motive, parfois avez-vous l’envie de lâcher l’affaire ?
En tant qu’entrepreneur et chef d’entreprise, je ne perds pas de vue la volonté de participer activement au développement et à l’amélioration de notre société et de notre territoire tout en restant dans leur rôle qui est le nôtre. Créer de la richesse et la répartir. La période que nous traversons nécessite une grande solidarité à bien des égards. Je suis un militant et un fervent défenseur de l’entreprise, je considère que beaucoup de solutions pourraient venir de l’entreprise privée si tant est qu’elle a les moyens. Plus de libertés et de moyens pour favoriser l’émergence d’un véritable tissu économique et retrouver des conditions favorables au développement des entreprises. Lorsque les indicateurs sont au vert, l’entreprise joue pleinement son rôle social et sociétal. Voilà un enjeu majeur pour lequel il faut jouer collectif pour que toute notre région puisse en bénéficier. L’enjeu est trop important pour baisser les bras, nous nous devons d’être présents et solides principalement pour les emplois que nous créons et soutenons. Nous avons la chance, bureau et conseil d’administration du Medef, de pouvoir compter sur le soutien indéfectible de nos nombreux adhérents militants.
Qu’est-ce qui vous rend fier ?
Je suis fier du mouvement que je représente et de tous ses adhérents qui m’accompagnent quotidiennement
Quelle est votre devise ?
« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve » Héraclite.
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