TOUS LES GARÇONS ETLES FILLES DE MON ÂGE

Pour en finir avec Depardieu

Par Jean-Pierre Nucci

Tous les garçons et les filles de mon âge se promènent dans la rue deux par deux… Qu’il est cocasse d’entendre Françoise Hardy interpréter cette chanson un peu niaise. Les yeux dans les yeux, la main dans la main… Comme si les rapports entre les jeunes garçons et les jeunes filles d’alors semblaient dépourvus de perversité et d’arrière-pensée. L’amour en priorité, le sexe après le mariage. C’était le temps de l’innocence. La duperie a cessé. Tout le monde n’est pas beau, tout le monde n’est pas gentil. Me Too a confirmé cette évidence avec force. La bataille contre le sexisme nous incite à la clairvoyance. Elle est juste et sa victoire est souhaitable. Sa lutte âpre. Nombre de personnes à la vue courte, c’est une étrange curiosité que d’observer une personne mener un combat d’arrière-garde, s’insurgent contre ce truisme. Leur enracinement dans l’erreur est profond, sans doute est-il la résultante d’une éducation conservatrice sévère. Assujetties à la tradition, asservies à l’ignorance, elles n’hésitent pas à enfiler le treillis et à rejoindre le champ des hostilités.

Les chiens aboient, la caravane passe.

Mais les hommes ne sont pas tous comme ça! S’indignent avec raison les vertueux. Qu’ils se rassurent, la boue épargne les gentilshommes. Ce mouvement, cette lame de fond irrépressible, frappe sans pitié les harceleurs, les salauds, les ingénus:

– Les salauds qui vampirisent leur victime. – Les harceleurs aux débordements en tous genres.
– Les ingénus à la candeur enfantine.

Malgré la horde en treillis, le paradigme a changé. Le litige relatif aux agressions sexuelles se joue désormais au tribunal. Les plaintes sont recevables. Il faut s’en féliciter. Le déni disparaît peu à peu, emporté par un vent salvateur vers des contrées lointaines. La vigilance reste toutefois de mise, car la banalisation est coutumière. Aujourd’hui, les salauds sont condamnés par la justice pénale (la prison pour de bon). Les harceleurs réfrènent

leurs ardeurs par crainte de poursuites judiciaires (la paix enfin). Les ingénus se réveillent contraints (je ne pensais pas mal faire).

À l’aune de ce constat, on s’interroge sur l’attitude de Gérard Depardieu. Mérite-t- elle une sentence? La question se pose. Et l’on se penche sur son éventuelle implication dans plusieurs affaires douteuses. De viols! Si ces crimes sont avérés, la condamnation pénale est méritée. D’attouchements non consentis. De même. De mots sexistes et dégradants portés à l’encontre de jeunes filles en public. La justice tranchera, elle dira si la judiciarisation d’un tel acte s’impose. La société, quant à elle, le bannira. Mais ce ne ont que des mots! Certes, mais proférés dans un cadre public, par un influenceur de fait. Sur ce point les anthropologues sont formels: les mots entretiennent le mal. Il serait temps d’entendre leur théorie et d’appliquer leurs recommandations. Quelles sont-elles? Éliminer une fois pour toutes de notre vocabulaire les allusions sexistes, les propos racistes, et bien d’autres infamies encore, car ils blessent et humilient. Leur préjudice est grand. Ils sont l’expression du malin.

Rappelons avec force qu’aucun être n’est supérieur à un autre, quelle que soit sa classe sociale, son sexe ou son appartenance identitaire. C’est ainsi et c’est heureux. Le cadre légal qui régit nos sociétés modernes répond à cette philosophie. Il se doit d’être appliqué sans exception. Même vis-à-vis des monstres sacrés

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