Colonel Philippe Fassy – La dernière sentinelle de la citadelle Miolis
Dernier commandant de la citadelle Miolis d’Ajaccio, le lieutenant colonel Philippe Fassy a accompagné sa rétrocession à la ville qui en a signé le rachat cet été. Il ne garde pas moins un œil attentif sur le projet d’évolution de cet édifice emblématique qui l’a accueilli en son sein durant plusieurs années et dont il est devenu un expert passionné.
C’est le 1er juillet 2014 que le lieutenant colonel Philippe Fassy débarque à Ajaccio, en tant que délégué militaire départemental et secondairement commandant de la citadelle Miolis. Il arrive là à l’issue d’un parcours militaire quelque peu atypique, toutefois débuté de façon très traditionnelle. En effet, après avoir passé une partie de son enfance en Afrique, au Cameroun, où son père travaillait pour le groupe pétrolier Elf Aquitaine, Philippe Fassy, qui dès l’adolescence souhaitait embrasser la carrière militaire, rentre en France pour étudier au Prytanée National militaire de La Flèche, puis par la suite à l’école Militaire de Saint-Cyr. Après un début de carrière au sein des forces françaises en Allemagne, c’est en 1995 que son chemin bifurque quand il intègre la DGSE où il restera près de 20 ans, enchaînant les missions en France et à l’étranger.
Coup de foudre ajaccien
Désireux après toutes ces années de quitter Paris où il était basé, pour évoluer à l’étranger, il décide alors de revenir sous l’uniforme, qui lui offrait à ce moment là la possibilité d’obtenir un poste de haut gradé en Nouvelle Calédonie. « J’avais en vue un poste à la direction de la sécurité et de la défense à Nouméa.
Malheureusement, pour des questions budgétaires, ce poste a été rétrogradé et ne pouvait plus m’intéresser ». Deux postes de Délégué militaire lui sont cependant proposés lui laissant le choix entre Tours et Ajaccio. « Je n’avais jamais mis les pieds en Corse mais mon épouse avait des connaissances qui y étaient implantées et en entendait beaucoup de bien. Nous n’avons pas longtemps hésité ! ». C’est ainsi que conduit par le fruit du hasard jusqu’à la cité impériale, il ne s’est fallu que quelques heures pour que ce passionné d’histoire tombe amoureux de la ville et de sa citadelle, chargée d’histoire, où est installé son bureau. Vieux de cinq siècle, le site constitué de fortifications, fossés, escarpes et contre-escarpes, de bâtiments de nature et d’intérêt divers n’avait déjà plus de vocation militaire, mais il fallait en gérer le personnel et la sécurité des lieux. « Très vite aussi il a fallu également mener les discussions avec la mairie sur la question de son acquisition par la ville qui était dans les tuyaux depuis bien longtemps.
En effet, pour des raisons budgétaires le ministère des armées souhaitait vendre afin de s’alléger des lourdes charges que ça représentait.
Passer la main avec confiance
Il fallait cependant éviter de reproduire le schéma de cession de la citadelle Montlaur de Bonifacio, dont les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances, sans aucun doute en raison d’un projet trop lourd à porter pour une ville de 3 000 habitants. La ville n’avait en définitive pas la capacité financière d’organiser, de développer et d’entretenir un site pareil, aujourd’hui couvert de graphitis ! C’est ce que nous voulions absolument éviter ici et qui a été le fil conducteur de cette cession, c’est pour cela que ca a pris du temps. Nous ne voulions surtout rien lâcher tant que nous ne savions pas ce vers quoi nous nous dirigions. Il fallait aussi régler les questions de dépollution, car le site est pollué par métaux lourds, il a fallu en déterminer les coûts, évaluer l’entretien… Des réflexions préalables à son acquisition ont été menées, tant sur les bâtis que sur les espaces publics. il y a eu des études patrimoniales, architecturales, paysagères. La ville a dû donner des gages. Et j’ai pu voir l’évolution et le sérieux avec lequel ces études ont été faites ! »
« Je me suis passionné pour cette citadelle qui est dans un état de conservation exceptionnel »
Passionné d’Histoire
Accompagnant ce cheminement et consacrant beaucoup de temps et de travail à ce sujet, Philippe Fassy s’est ainsi peu à peu passionné pour l’histoire du lieu dont il est devenu un expert. « Ce n’’était pourtant pas dans ma zone d’intérêt et de compétence de l’histoire militaire, qui concerne plutôt le XVIIe siècle. J’écris d’ailleurs une biographie du Maréchal de Villars, sauveur du royaume de France, que je ne finirais peut être jamais! dit-il avec une pointe d’autodérision. J’ai donc ainsi beaucoup étudié. Et en tant que patron des lieux j’ai eu la chance de côtoyer pour l’occasion Antoine-Marie Graziani, historien renommé spécialiste de la Corse et Nicolas Faucherre, sommité mondiale dans le domaine des fortifications, qui m’ont beaucoup appris.»
Inscrit au titre des Monuments historiques depuis 2017, l’ensemble de la Citadelle est ainsi devenu propriété de la ville le 4 juillet dernier. Fidèle aux engagements pris, une grande phase de concertation publique a depuis été ouverte par la ville afin de proposer un projet d’aménagement du site le plus en accord possible avec les attentes des ajacciens. Pour sa part, et souhaitant apporter sa pierre à l’édifice, le colonel Philippe Fassy aujourd’hui retraité des armées a d’ores et déjà obtenu l’accord du directeur du musée des invalides pour que soient cédés quatre canons de Gribeauval, référence à l’artillerie de la grande armée de Napoléon 1er, qu’il souhaiterait voir placer au quatre coins du site. Une jolie façon de souligner le lien avec l’empereur et de rappeler la vocation militaire du site sur lequel il entend bien garder un œil attentif.
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