Corse 2030 : « S’adapter pour rester compétitifs »

À la tête du Medef Corse depuis janvier 2022, Jean-Louis Albertini croit en l’intelligence collective et en la mobilisation des forces. C’est d’ailleurs ce qui ressort de la grande enquête lancée auprès des acteurs du monde économique et de l’entreprise : 20 priorités autour de 5 grands enjeux pour la Corse, pour son avenir.

Par Caroline Ettori

Qu’est-ce qui a motivé la réalisation de l’étude Corse 2030 ?

Plusieurs raisons nous ont poussés à lancer cette étude. D’abord, il y a la nécessité d’anticiper les mutations économiques et sociétales. La Corse fait face à des transformations rapides, des mutations de niveau mondiales qui viennent impacter notre île. Nous devons nous adapter pour rester compétitifs, surtout dans les secteurs sensibles qui sont les fleurons de notre économie, tout en préservant notre identité, notre culture et notre patrimoine. Cette enquête est donc un véritable constat collectif de la majorité des acteurs économiques de notre territoire, nous ne devons pas nous reposer sur nos acquis, si nous voulons que l’économie de la Corse et des Corses soit pérenne, viable et stable.

Comment a-t-elle été réalisée ?

C’est une démarche collective que nous avons portée et pilotée ! Pendant 5 mois, près de 60 chefs d’entreprises et acteurs du monde économique se sont mobilisés pour esquisser une vision commune. L’ensemble de la vingtaine de priorités et préconisations, qui sont présentes dans cette enquête, a remporté l’adhésion de tous les participants. Notre objectif n’est pas de montrer un unique chemin, mais de montrer que nous pouvons construire ensemble l’économie de la Corse de demain.

Les acteurs économiques disposent-ils de suffisamment de données quantitatives et qualitatives pour évoluer, se projeter dans leurs activités ?

Cette question est particulière, car oui, il existe des chiffres, des données et de très nombreuses enquêtes, mais elles sont souvent très spécifiques ou très orientées. De plus, le chef d’entreprise n’a pas toujours le temps d’aller chercher ces informations qui sont fréquemment échangées entre institutionnels ou académiciens. On peut aussi parler du rôle de traduction que l’on doit faire dans ces enquêtes, voilà pourquoi nous voulions un rendu court et percutant !

Quels en sont les principaux enseignements ?

Le premier, c’est que nous pouvons construire ensemble des préconisations pour notre île. Des acteurs économiques qui parfois ne sont reliés par rien peuvent s’asseoir et travailler conjointement pour dessiner une vision commune avec une seule idée en tête, celle d’une croissance durable et soutenable. Nous nous rendrons compte que dans ce genre de situation ce qui prime est l’intérêt général de notre île. Le deuxième, je dirais que c’est la multitude des enjeux et des leviers d’actions, car oui, les problématiques sont nombreuses, mais les solutions aussi !

Vous définissez 20 priorités répondant à 5 grands enjeux pour la Corse. Comment faire pour dépasser le stade du simple constat ?

Là encore, ce sera une démarche collective, nous avons déjà commencé à travailler avec certains acteurs publics locaux pour passer de la réflexion à l’action. Il faut que le couple public/privé se forme pour que nous puissions mutualiser nos moyens, nos réflexions et notre capacité d’action ! Nous invitons tous les acteurs publics ou privés intéressés par cette démarche à se rapprocher de nous, il n’est pas trop tard, la croisée des chemins est maintenant.

Quels sont selon vous les leviers, les relais qui permettront d’atteindre ces objectifs ?

La volonté et la mutualisation des moyens seront les clefs ! Je pense que parfois les crises et les périodes de transition comme celle que nous vivons aujourd’hui sont de vrais moments d’opportunité !

Après le discours de politique générale du Premier ministre Michel Barnier et la présentation du budget, comment appréhendez-vous l’avenir des entreprises insulaires ?

Le discours de politique générale a permis de clarifier les grandes orientations que le gouvernement souhaite adopter dans le contexte actuel, et il est certain que les décisions budgétaires qui suivront seront cruciales pour l’avenir des entreprises corses. En tant que président du Medef Corsica, j’appréhende cet avenir compte tenu des premières orientations annoncées avec beaucoup de prudence et de vigilance, mais aussi un certain optimisme.

Les entreprises insulaires font face à des défis spécifiques, notamment liés à l’insularité, aux coûts de transport, et à l’accès aux marchés continentaux. Nous espérons que le prochain budget prendra en compte ces réalités particulières et apportera des mesures de soutien adaptées, comme des aides renforcées à l’investissement, des allègements fiscaux pour stimuler la croissance locale, et des dispositifs d’incitation à l’embauche, en particulier pour les jeunes et les personnes éloignées de l’emploi. Je pense aussi que certaines déclarations des plus hauts représentants de l’État sur l’île ont démontré que nos spécificités ne seront pas oubliées.

Dans ce contexte particulièrement tendu et troublé, quel rôle doit jouer le Medef Corse ?

Nous avons plusieurs rôles à jouer, être aux services des chefs d’entreprises pour répondre à leurs difficultés. Mais aussi être force de proposition et jouer notre rôle d’influence à travers nos projets comme cette enquête. Notre statut de première organisation patronale de France nous permet aussi d’être présent dans toutes les instances du quotidien des chefs d’entreprises : Urssaf, DRFIP, CPAM… Pour finir, nous avons aussi un véritable rôle de lanceur d’alerte, car nous sommes au plus près des besoins et des difficultés des chefs d’entreprises corses !

Comment voyez-vous évoluer le Medef Corse ? Quels sont les défis qu’il aura à relever ?

Je crois que nous sommes sur une excellente dynamique, nous sommes aujourd’hui dans la capacité de jouer tous les rôles que je vous ai cités précédemment. Nous avons une équipe stable, extrêmement compétente et toujours en mouvement ! Le Medef Corsica investit dans un poste avec une personne à temps plein sur les questions de transition écologique. Nous finissons cette année 2024 avec 3 grands objectifs pour 2025 accompagnés des entreprises en matière de transition écologique, la mise en action des priorités que nous avons identifiées dans ce livrable. Nous avons aussi un gros sujet sur les transports corses et pour finir, la crise du logement est aussi une problématique majeure pour les salariés de nos entreprises. Le logement intermédiaire des salariés au plus proche des bassins d’emploi est un vrai sujet.

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