Edito – Avril 2015
La loi du mensonge
Par Jean Poletti
S’agissant de la Corse, certains petits ducs de la télévision font assaut d’humour facile. De goût douteux. Et d’une hauteur de vue qui n’atteint pas le Cinto. Lors d’émissions grand public il suffit que tel animateur, diplômé du néant, prononce une ineptie pour que l’auditoire invité affiche l’ironie au bord des lèvres. Une ile entourée d’eau ? La célèbre formule, volontairement provocatrice, de feu Emanuel Arène pour signifier une complexité liée à l’insularité fut récemment qualifiée de pléonasme par un chroniqueur. Euréka ! L’homme des plateaux pensait prendre quelque altitude intellectuelle. Moquant au passage l’ignorance qu’il avait cru déceler chez le talentueux parlementaire et écrivain reconnu. Passons sur l’impétrant qui régulièrement se vautre dans des plaisanteries, aussi puériles que méchantes. Même la mort tragique n’est pas pour lui propice à étendre un suaire de respect. N’est pas gai luron qui veut.
Et que dire de ceux qui firent des gorges chaudes sur la pseudo escroquerie d’agriculteurs aux aides européennes. Sept cents millions d’euros indument empochés clamait dès l’aube un professionnel de l’information, célèbre pour son écharpe rouge. Il fallut un vigoureux démenti ministériel et une mise au point étayée du préfet Christophe Miramand pour que cessent ces assertions mensongères. Mais le mal était fait. Une nouvelle fois. Et même en tendant l’oreille ou munis d’une loupe, entendre ou lire, non pas un acte de contrition mais de simples rectificatifs, relevait de la gageure.
Brisons là cette liste infinie, pour réaffirmer sans ambages que notre réaction courroucée n’est nullement une attaque contre la liberté d’expression. Rien de plus normal que nos travers et turpitudes soient relatés. Mais pourfendre injustement une population en alimentant l’inconscient collectif hexagonal de faux travers multiséculaires, s’apparente à une stigmatisation rampante. A les entendre, chez nous tout n’est que paresse, prébende, dissimulations, arrangements entre amis. Qui oserait dire que sur les bords de la Seine ou dans la France profonde ces assertions n’ont pas force de loi ?
Faut-il rappeler, ici, que lors de l’assassinat de Claude Erignac, tous les Corses furent qualifiés de préfeticides ? Doit-on redire que le faux alibi de l’omerta, sert trop souvent de complice providentiel à l’incurie de ceux qui ont mission de faire respecter l’Etat de droit ? Est-il opportun de rafraîchir la mémoire médiatique défaillante en évoquant telle conférence de presse dite clandestine ? Chacun sait pourtant qu’elle se tint à l’époque, sinon avec la bénédiction, du moins avec l’aval tacite de la Place Beauvau. De Sénèque à Poniatowski, le florilège des perfidies n’en finit plus. D’autant que la relève parait assurée !
La Corse souffre économiquement et socialement. Une personne sur cinq vit en dessous du seuil de pauvreté. Le chômage croit inexorablement. Mais cette vision, qui rejoint la réalité, n’intéresse visiblement pas les adeptes d’idées reçues. A nous Freud. Descartes à la rescousse. Charlie hebdo, au secours, ils sont devenus fous !
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