Edito Décembre 2014
Des plans sur la comète
Par Jean Poletti
Entre non dits et comptes d’apothicaires, la Corse ne distingue plus clairement l’essentiel et l’accessoire. Les faits sont pourtant têtus. Une communauté ploie sous le scepticisme. Elle a l’impression diffuse ou affirmée d’être abandonnée, par ceux qui ici ont mission de fixer le cap. D’éclairer un chemin. Bref d’appliquer le fameux concept stipulant que gouverner c’est prévoir.
Les grandes interrogations qui font légitimement débat paraissent laisser la classe politique démunie. Elle donne le sentiment de circonscrire son énergie dans des dossiers qui échappent aux préoccupations quotidienne des citoyens. Tout en paraissant indifférente aux messages réitérés des socioprofessionnels. Pis encore, des questions reviennent en leitmotiv, comme si l’éventuelle solution s’avérait impossible. L’exemple du hiatus maritime étant a cet égard particulièrement significatif. Et que dire du fameux Plan d’aménagement et de développement ? En gestation depuis près de trois décennies, il ne dut son salut qu’à de profondes modifications nationalistes de dernière minute.
Certes, Rome ne se fit pas en un jour. Mais chez nous maints édiles affichent une propension chronique à se défier à fleuret moucheté sur des sujets qui indiffèrent la population. En corollaire la sémantique employée verse dans une exagération qui suscite l’ironie. Un projet fiscal ? Forcément historique. La charte linguistique ? Nécessairement cardinale. Le statut de résident ? Véritablement incontournable. Et comme en ombre portée cette assertion éculée a force d’être utilisée : La Corse est a un tournant, quand elle n’est pas à la croisée des chemins !
Tournez manèges, passez muscades, nous voilà emportés dans la sarabande des mots, de l’illusoire, des plans sur la comète, alors que la vérité se teinte de précarité, et de désespérance.
En cette période festive, propices aux agapes, les restos du cœur sont débordés. Voici venir l’hiver terreur des pauvres gens. Les immortels vers de Hugo paraissent sculptés pour notre île.
Tous ces adeptes des belles phrases ne font plus rêver. Les professionnels de l’invective contre l’Etat, l’autre, l’invisible ennemi, sont disqualifiés par le peuple qu’ils sont censés défendre. Un projet global, cohérent, alliant économie, social, mieux être individuel et collectif relèverait-il de l’utopie ? Est-il véritablement surréaliste d’espérer que sur cette terre si riche en potentialités se fanent encore et toujours les fleurs d’un avenir plus clément ?
Jusqu’à quand, Le vivre ensemble demeurera un slogan dépoussiéré à chaque élection, prompt à rejoindre le tiroir aux oubliettes au lendemain du scrutin ?
Noël apporte dans sa hotte l’espérance. Cette notion dit-on soulève les montagnes. L’immense majorité n’en demande pas tant. Elle aspire simplement que les augustes regards la regardent enfin. Que les oreilles se tendent pour entendre sa légitime supplique. En ces temps de grandes messes qu’elle est pour une fois voix aux chapitre. Amen.
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