Edito – Janvier 2015
EDITO
La page blanche
Par Jean Poletti
Le nouvel an a poussé hors du temps les douze mois écoulés. Pas de regrets. La Corse ploya au risque de rompre sous le joug des désillusions. Une crise économique sans précédent un climat social délétère et les prémices d’une société qui se délite furent les éléments d’une néfaste trilogie. Insidieusement le marasme s’instaura. Suscitant la désespérance. Notre île, que l’on dit bénie des dieux, offre le triste tableau de la paupérisation. Le redire à l’envi ne vaut pas esquisse de remède. Pis encore, il inscrit dans les têtes une sorte de fatalisme qui privilégie l’individualisme, le repli. Et finalement la fin de l’intérêt général, sans lequel tout progrès est illusoire. Jamais sans doute notre communauté fut tourmentée au point de perdre repères et lisibilité. Dans une sorte de gestion au quotidien elle rechigne à envisager l’avenir. Optant pour la survie personnelle, aux antipodes du progrès partagé et pour tout dire du socle démocratique. Les signes du rabougrissement sociétal sont patents. Ils se concrétisent par le désintérêt envers les grands projets qui hier suscitaient clivages et effervescence. A telle enseigne que les débats institutionnels, constitutionnels, ou d’aménagement de l’espace parurent mobiliser exclusivement la collectivité territoriale. Sous le regard indifférent de la société civile. Voilà qui conduit naturellement s’interroger sur le clivage majeur entre les citoyens et leurs élus. L’ensemble de l’échiquier politique ne fait plus recette. Sa dialectique n’enregistre qu’un faible écho. Comme si son langage, positionnement ou prospective n’était sinon plus crédible à tout le moins inaudible par ceux qu’elle est censée représenter. Là ou les citoyens veulent légitimement du pragmatisme, l’offre abonde en concepts intellectuels et remèdes placebo. Demain on rasera gratis ! Ce slogan décliné sous toutes les formes est usé a force d’être employé depuis des lustres. Il ne suscitait pas de commentaires acerbes tant que la misère n’était pas prégnante. Mais aujourd’hui de tels propos s’apparentent au sein de la majorité silencieuse à un déni de réalité qui pallie l’absence de réponses aux légitimes questionnements.
Changer de logiciel. Voilà la revendication diffuse du peuple à l’égard de ceux qui sont censés les représenter. L’appel est pressant. Il nourrit les conversations informelles et fustigent ceux qui confondent mandat électif et rente. Et assimilent le suffrage universel à une vile compétition d’egos.
Le nouvel an ouvrira un cycle de rendez-vous électoraux. Les citoyens ne rêvent pas de révolution et de lendemains qui chantent. Mais simplement que des voix s’élèvent pour scinder clairement le souhaitable du possible pour qu’enfin soit tracé le chemin d’une Corse nouvelle. Bannissant vieilles lunes et mirages qui contribuèrent à plonger un peuple dans la désolation.
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