Edito – Novembre 2014
Edito
Dépôt de bilan
La Corse se trouve désormais face au mur de la réalité. A trop triturer l’évidence elle se révolte et détruit le château de cartes bâti sur l’illusion. La communauté insulaire ressemble à un boxeur sonné qui risque le coup fatal si l’arbitre n’arrête pas le combat. Durant des années certains confondirent allègrement prés-carrés et intérêt général. Le mandat électif conjugua trop souvent la rente et le projet.
En corollaire les statisticiens patentés tentèrent de minimiser la lente descente aux enfers d’une région. D’une année, l’autre, les chiffres commentés affirmaient que le bout du tunnel était à portée de main. Imprévoyance et dissimulation revoyaient à la catastrophe du Titanic qui sombrait corps et biens tandis que l’orchestre continuait à jouer.
. Tous les domaines qui fondent le vivre ensemble on rompu leurs amarres. Les digues qui ceinturaient le fait sociétal sont balayées par trop de lames de fond. Au-delà de la tempête qui cloue au pilori le monde socioprofessionnel il convient de souligner que la population n’ose même plus imaginer un avenir collectif. Les gens vivent au jour le jour. Ils sont englués dans des préoccupations matérielles, confinant parfois à la survie. Quelle est l’offre proposée par nos représentants ? Qui hiérarchise les priorités et indique fut-ce à grands traits les solutions réalistes ? Quel pourrait être le visage de la Corse dans la prochaine décennie ? Agriculture, tourisme, artisanat, bâtiment, aménagement du territoire, transports, tous ces secteurs sont étroitement imbriqués. Pourtant chacun semble prêcher pour sa propre paroisse. Et les revendications pour spectaculaires qu’elles soient ne reflètent que l’écume des choses. Tout est lié. Ne pas l’admettre équivaut à croire qu’un pan d’activité peut survivre sans les autres. L’Europe si décriée apporta sa manne financière, notamment lorsque notre ile devint éligible au fameux objectif numéro un. Le Plan exceptionnel d’investissement et ses quelque trois milliards d’euros fut aussi un formidable cache-misère. Et maintenant ? Les subventions se tarissent, et rien de vraiment nouveau sous le soleil. Un peuple est cloué au pilori de la misère. Ici une personne sur cinq vit sous le seuil de la pauvreté. Dans le même temps l’immobilier flambe, et le logement social est aux abonnés absents. Cette seule contradiction suffit à démontrer les ravages des lacunes récurrentes et surtout l’absence d’une véritable doctrine liée à l’essor maitrisé.
Dès lors laisser la parole uniquement aux économistes, ou supposés tels, équivaut à regarder une problématique par le petit bout de la lorgnette. Sans une vraie offre politique, qu’une majorité silencieuse appelle de ses vœux, tout ne sera que cautère sur jambe de bois. Et toute la Corse sera bientôt en dépôt de bilan !
Jean Poletti
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