Edito – Septembre 2013
Synthèse priez pour l’ile
Le projet mêle rationalité et fantasmes. Le contenu du rapport Chaubon semble négligé au profit de réactions polémiques liées aux appartenances politiques. L’histoire bégaie. Elle nous replonge au temps des statuts Defferre, Joxe ou Jospin, et leurs mémorables antagonismes entre jacobins et girondins. Certes le temps a poli nombre d’aspérités. La collectivité territoriale ne fut pas, comme le prédisaient certains, le toboggan de l’indépendance. Les réfractaires patentés firent, par ailleurs, leur miel de cette institution, en la gérant pendant deux décennies. Dans quelques jours les édiles régionaux auront à dire clairement s’ils souhaitent une nouvelle évolution. Tel est l’enjeu initial. Le reste n’est qu’argutie juridique, et pour parodier de Gaulle problème d’intendance. Car comme l’affirme fort justement Jean-Guy Talamoni, les faits précèdent toujours le droit. Une chose est certaine, il faudra qu’une écrasante majorité valide le document. Le danger ? Au nom du large consensus une pluie d’amendements pourrait le dénaturer, l’édulcorer et finalement le défigurer. Eviter les dissonances trop criardes, fut-ce au prix d’une unité de façade. Voila l’obstacle. Il n’est pas vue de l’esprit. La droite rechigne, des républicains aussi. Nous revoilà dans la configuration des années Mitterrand. A deux différences près. A l’époque le mouvement clandestin refusait la troisième voie. Et cette fois les réformes n’émaneront pas de la volonté de l’ancien président socialiste, fort d’une majorité à l’Assemblée nationale, mais devront être initiées par les élus territoriaux. Si des fractures devaient émailler leur prochaine réunion, le chant d’espoir deviendrait requiem.
Faut-il rappeler que cette première étape, même franchie sans anicroche, serait pour les concepteurs un simple satisfecit ? En effet il faudra impérativement organiser un referendum local. Et en épilogue qu’au moins les trois-cinquièmes des députés et sénateurs, réunis en congrès à Versailles, acceptent de modifier la sacro-sainte constitution. Les suffrages de gauche n’y suffiront pas. L’ombre portée des grands décentralisateurs planera-t-elle suffisamment sur ce château qui symbolisa tant l’arbitraire royal ? L’expectative prévaut. Les leaders nationaux de l’opposition, à l’image de Coppé ou Borloo, ont d’ores et déjà affiché leur hostilité. Tandis que dans les rangs de la majorité certains disent leurs atermoiements.
Chez nous, la fonction tribunicienne de certains élus ou responsables de formations politiques atteint ses limites. Le magistère de la parole et des philippiques estivales relèvent de l’artifice suranné. Le temps du vote est venu. Celui ou chacun doit prendre véritablement ses responsabilités et se hisser à la hauteur de l’enjeu. Et si la réforme et le statu-quo se fondaient intelligemment dans une synthèse auréolant exclusivement l’intérêt collectif d’une région?
Jean Poletti
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