Elle signe avec Malte un nouveau partenariat : Le rayonnement international de Stella Mare

On ne présente plus la plate-forme scientifique basée à Biguglia. Sous l’autorité de l’université de Corse, elle affiche des résultats probants dans les domaines de sauvegarde d’espèces maritimes particulièrement vulnérables. Des travaux reconnus dans l’Hexagone et au-delà des frontières. Cette fois, c’est l’archipel maltais qui a passé convention afin de donner en ce lieu une seconde vie à l’oursin. Et plus globalement pour la gestion des ressources halieutiques. Une collaboration qui en appelle d’autres.

Par Jean Poletti

Exporter un savoir-faire. Se positionner avec efficience. Être un interlocuteur écouté et entendu. Cette ascèse ne doit rien aux fruits du hasard mais dénote le travail et le sérieux d’une équipe qui depuis maintenant une quinzaine d’années œuvre pour que maintes espèces de la faune méditerranéenne ne disparaissent pas. Un enjeu aux lisières écologiques qui influe bénéfiquement dans le monde des pêcheurs et en épilogue du commerce. À l’actif de Stella Mare figure en bonne place la réussite de la reproduction de la langouste, l’huître plate, le homard ou la patelle géante. Sans oublier le denti et autre grande araignée. Qu’il s’agisse de surpêche ou d’éléments liés aux mutations climatiques, ces colonies s’étaient raréfiées au risque pour certaines d’être reléguées au rang de souvenirs. Sans verser dans le panégyrique et tisser des lauriers, nul doute que cette structure apporte sa pierre à l’édifice afin que la mer demeure un espace vivant, fourmillant de mollusques et crustacés qui tutoyaient l’inexorable déclin. Juvéniles élevées en laboratoire, analyse suivie de résultats et viabilité expérimentée. Mise au point de programmes spécifiques sériés d’étapes et d’adaptations. Tout ce panel alliant pragmatisme et volonté d’aboutir ont d’ores et déjà porté leurs fruits… de mer.

Dans cette saga de réussites nombreuses et variées s’affiche comme un symbole le fameux oursin. U zinu tant prisé et qui dépérissait presque à vue d’œil au point que des moratoires de capture furent décrétés sur nos rivages. Le pire est passé chez nous. Celui que l’on surnomme le caviar de la mer a si l’on ose dire repris du poil de la bête. Mais au risque d’insister, cela ne fut pas l’apanage de la chance ou de coïncidence heureuse, mais d’un apport efficace de la science dans les bassins expérimentaux de Biguglia.

De grandes perspectives

Cette vague de succès atteint des pays lointains, valant en incidence à l’ancien directeur Antoine Aiello et son équipe de recevoir la médaille de l’innovation du CNRS. Une signalée récompense qui rejaillit sur l’implication universitaire dont on sait par ailleurs les implications dans différents domaines de recherche fondamentale. L’eau coula sous les ponts et cette fois c’est l’agence gouvernementale maltaise qui veut profiter des connaissances insulaires. Une collaboration qui se concrétisa récemment par un accord général de collaboration. Avec comme volet initial un partenariat concernant la résurrection de l’oursin, qui joue l’Arlésienne en ce lieu posé au centre du grand bleu, entre la Sicile et la côte d’Afrique du Nord. Les signataires du contrat donnaient, si cela était utile, l’importance qu’un État étranger, fut-il modeste, confère à l’institution corse. Ainsi Dominique Federici, président de l’université, Pierre-Mathieu Nicolaï actuel directeur de Stella Mare, paraphèrent le document avec Alicia Bugeja Said ministre de la pêche et Francis Fabri dirigeant de l’agence des ressources aquatiques.

Une alliance qui s’apparente à une planche de salut pour Malte. Elle ne veut pas en effet rester les bras croisés face à la déperdition d’un mets tant prisé par sa population et qui depuis quelque temps n’est plus à la table des convives. En corollaire, cet apport d’expérience sera à n’en point douter le bienvenu afin de revivifier un bras de mer qui comme tant d’autres souffre de dépeuplement.

Pour Dominique Federici une telle coopération allie, au-delà du factuel, une double reconnaissance. Celle du savoir-faire et du faire- savoir, qui ouvre probablement d’autres portes ailleurs tant l’excellence et l’originalité des solutions engendrées sauront séduire des nations, elles aussi frappées par l’appauvrissement halieutique.

Pour l’heure, le président de l’université se refuse à tirer des plans sur la comète, même si les plausibles perspectives ne sont pas à ses yeux chimère.

Écologie et économie Dans l’immédiat, il explicite que l’actuel contrat matérialise la stratégie d’accentuer les capacités de recherche dans le secteur de la biodiversité marine. Un objectif sans conteste fait d’ambition et de réalisme qui trouve une pierre angulaire « avec l’avènement de projet communs avec les autorités maltaises ». Ce point d’ancrage est en effet pour lui un moyen de démontrer que l’université peut et doit devenir l’épicentre et l’acteur majeur de la recherche méditerranéenne. Une ambition qui à l’évidence appelle le renforcement des liens avec d’autres îles, qui auront « des retombées économiques bénéfiques pour la Corse ». Chacun aura compris sans qu’il faille insister outre mesure que ces recherches, pour majeures qu’elles soient, ne se limitent pas aux stricts contours de la théorie.

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