Encore une. Les commissions se succèdent au chevet du centre hospitalier de Falconaja. Récemment un aréopage vint établir un nouveau diagnostic. Pourtant la problématique est connue depuis bien longtemps. Il faut un nouvel établissement tant l’actuel est obsolète et ne répond plus aux besoins.
Par jerôme Paoli
Trois experts de la commission nationale d’investissement de la santé étaient sur place. Leur mission consistait à réévaluer les besoins. Cet examen serait cocasse s’il ne concernait pas une structure périmée qui continue d’accueillir plus de la moitié des patients de l’île. Les émissaires prirent consciencieusement des notes, écoutèrent les doléances. Et repartirent sans livrer le moindre sentiment. Un tel déplacement s’avérait à l’évidence superfétatoire. Le ministère regorge en effet depuis des années de dossiers conjuguant la vétusté de l’hôpital et l’urgent besoin d’édifier son successeur. Réhabilitation? Le personnel soignant n’en veut pas. Ce refus n’est pas une lubie, rejette une mesure qui constituerait un vain palliatif. Un faux remède dont l’épilogue ne résorberait pas les nombreuses carences. La solution pérenne et rationnelle ne souffre pas d’atermoiement ou de cautères sur jambe de bois. Il faut une création. Le terrain est d’ores et déjà mis à disposition par la mairie. Certes, cette construction avoisinerait les trois cent millions d’euros. Mais cela vaudrait mieux que ces rafistolages sans fin qui s’avèrent onéreux sans pour autant offrir des prestations satisfaisantes Pérennisant implicitement une grave entorse au concept d’égalité des soins. Pourtant, l’an dernier, le président de la République lors d’une allocution devant l’Assemblée de Corse avait souhaité «un centre hospitalier à la hauteur des besoins de ses habitants».
Pour volontariste qu’elle fut une telle annonce laissait dans l’ombre l’alternative entre une amélioration de l’existant et un chantier novateur. Et comme en écho le ministre de l’Intérieur laissait entendre qu’une « bonne nouvelle » pourrait être annoncée. Depuis silence radio dans les sphères décisionnelles. Et nous assistons au rituel des missi dominici qui prennent des notes et consultent.
Opération silence
Ce dossier est emblématique d’une indécision aux lisières de l’incurie. Il remet en mémoire la maxime de Clémenceau « Pour enterrer un dossier, rien de mieux que de créer une commission. » À cet égard, nous sommes copieusement servis. Rien n’y fait, pas même les récriminations d’insulaires au lendemain du Ségur de la Santé, où la problématique bastiaise brillait par son absence. Peu ou pas d’écoute également du plaidoyer de Bianca Fazi, médecin et conseillère exécutive territoriale. Réponse elliptique aux interventions à l’Assemblée nationale du député Michel Castellani. Pétitions, mouvements syndicaux, alertes diverses et variées adressées aux ministères successifs. Toutes ces actions s’apparentant à un légitime cahier des doléances demeurèrent sans résultats probants. Et pendant ce temps- là, soins et admissions se poursuivent notamment grâce à la disponibilité et une grande conscience des personnels. Ils pallient ainsi du mieux qu’ils peuvent les faiblesses structurelles et logistiques d’un hôpital à bout de souffle. Faute d’avoir répondu d’emblée aux avertissements, émanant de ceux et celles qui connaissaient parfaitement les insuffisances criantes, le point de non retour est atteint. D’ailleurs le collectif des usagers du centre hospitalier ne dit pas autre chose. Au gré de ses interventions médiatiques, il martèle que l’expectative ne peut décemment pas se prolonger.
Scepticisme ambiant
Rapports. Conclusions. Pistes. Autant d’hypothèses qui depuis fort longtemps s’entourent de silences qui ne présagent rien de bon. Une sorte d’anesthésie administrative semblant jouer sur la lassitude des édiles et de la population locale. Cette idée fait son chemin. Elle enfle et incite les plus pessimistes à dire que rien ne sera fait. Affirmant désabusés, qu’hier comme aujourd’hui et sans doute demain, l’avion vers Marseille demeurera le meilleur médecin. En association d’idée, que nul ne peut révoquer, se dessine le sort fait à un futur Centre hospitalier universitaire qui demeure enseveli dans des cartons parisiens. Cette absence fait de la Corse la seule région de France et d’Outre- mer à en être dépourvue. Cela en parfaite illégalité avec la règlementation en vigueur. Voilà un particularisme dont on se passerait bien. À telle enseigne que nombreux ici et sur le continent plaident pour qu’une telle spécificité négative s’estompe au profit du droit commun. Dans l’immédiat le ministre de la Santé a comme ses prédécesseurs toutes les données sur son bureau. Les experts en tout genre qui viennent prendre le pouls font au mieux un travail inutile. La décision est politique. Veut-on ou pas donner à la Haute-Corse une structure qu’elle mérite dans le simple respect de l’égalité des soins ? Le reste n’est que littérature, vains déplacements. Et pour tout dire simple artifice de communicants pour endormir la galerie.
Adage amputé
Dès lors se profile dans les esprits l’idée que sur les bords de la Seine il a été décidé de modeler l’adage qui stipule la santé n’a pas de prix mais elle a un coût, en lui préférant la seconde partie au détriment de la première. Question de choix entre nécessité médicale et compte d’apothicaire!
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