Crise du Covid-19, niveau des élèves, langues régionales, malaise enseignant… nombre de sujets sensibles attendent Jean-Philippe Agresti, nommé le 15 décembre 2021 nouveau recteur de l’académie de Corse, pour sa première rentrée à la tête du rectorat. Et un réel défi également puisque c’est aussi sa première expérience dans de telles fonctions.
Portrait
Par Karine Casalta
À 47 ans, c’est un jeune recteur plein d’enthousiasme qui arrive sur l’île pour servir la jeunesse corse. Précédemment doyen de la faculté de droit et de science politique de l’université d’Aix-Marseille, Jean-Philippe Agresti a pris ses fonctions de recteur de l’académie de Corse le 20 décembre dernier, en remplacement de Julie Benetti, qui était à ce poste depuis juin 2018. Une nomination qui intervient en continuité d’un engagement depuis de longues années au service de la jeunesse « ça a été un honneur pour moi que de recevoir cette nomination, d’être recteur, tout d’abord, et recteur en Corse qui plus est, qui a été un élément déterminant dans le fait que j’accepte cette proposition ».
Un attachement fort à la Corse
Car Jean-Philippe Agresti voue un fort attachement à l’île. Un attachement personnel tout d’abord, de par ses racines familiales entre Ghisonaccia et Pietralba en particulier, d’où venait sa grand-mère. Et un lien professionnel fort également, qui s’est construit au travers d’actions qu’il a menées, avant d’être doyen, à la faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille. « Professeur des universités, j’avais alors demandé et obtenu au ministère de l’Intérieur un agrément à la formation des élus locaux. Dans ce cadre-là, j’ai eu l’occasion de venir organiser plusieurs séances de formations en Corse, avec le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) ainsi qu’avec les centres de gestion de la Corse-du-Sud et de la Haute-Corse, à destination des élus locaux et des techniciens des collectivités territoriales de l’île. Ce partenariat s’est poursuivi par la suite par ma participation régulière aux jurys de concours de la fonction publique territoriale. J’ai notamment présidé, avec le centre départemental de gestion de Corse-du-Sud, plusieurs jurys de concours, dont celui d’attaché territorial, que j’ai présidé à plusieurs reprises. »
Un exemple parmi tant d’autres de son investissement pour la chose publique dont il a fait preuve tout au long de sa carrière, au travers notamment de son implication au sein de la faculté de droit et de science politique d’Aix-Marseille Université. Et qui a pu se traduire aussi lors des dernières municipales à Marseille par l’envie de s’engager politiquement au service du territoire.
Un pur produit de l’ascenseur social républicain
Docteur en droit, titulaire d’un DEA, enseignant-chercheur en histoire du droit et auteur de plusieurs publications, son parcours l’a conduit à occuper de 2012 à 2016 le poste de vice-président de l’université Aix-Marseille en charge de la vie étudiante, avant de prendre la vice-présidence des partenariats avec le monde socio-économique puis d’être élu en 2017 doyen de la faculté de droit et de sciences politiques de l’université phocéenne.
Un riche parcours universitaire auquel il n’était pas forcément prédestiné.
Issu d’un milieu populaire, Jean-Philippe Agresti se qualifie en effet lui-même comme un pur produit de l’ascenseur social républicain. Né dans le quartier du Racati, proche de la gare Saint-Charles à Marseille, il a grandi entre un père commerçant qui travaillait sur les marchés et une maman agent administratif. Des parents aimants qui, dit-il, lui ont toujours laissé une grande liberté, de pensée et d’action fondée sur la confiance, mais avec néanmoins de réelles exigences pour tout ce qui touchait à l’école. « Il y a une chose avec laquelle il ne fallait pas plaisanter tant pour mon frère que pour moi, c’était l’école. Dans l’esprit de mes parents, je l’ai compris très vite, il n’y avait pas d’autres chemins pour avoir une belle vie que de réussir à l’école. Nos résultats scolaires, nos comportements dans ce domaine, étaient scrutés avec attention. »
Un engagement au service de la chose publique
Élève appliqué et studieux, c’est naturellement qu’après son baccalauréat il choisit de s’orienter vers l’université, avec le sentiment que cela correspondait à une forme de liberté d’apprentissage. Attiré par les sciences humaines et sociales, il s’engage alors dans un cursus en droit, sans véritable objectif professionnel dans ce domaine, mais néanmoins déjà avec une idée de service public. C’est après sa maîtrise qu’il commencera à prendre goût à la recherche, qui le conduira à devenir enseignant-chercheur, puis de fil en aiguille à s’orienter plus précisément vers l’enseignement. Multipliant durant ces années toutes sortes de petits boulots pour financer sa thèse, il sera notamment recruté par l’université de Nice en tant qu’attaché temporaire d’enseignement et de recherche durant 2 ans, avant de revenir travailler à l’université d’Aix-en-Provence en tant qu’employé administratif puis, après la soutenance de sa thèse, être recruté comme maître de conférences. Appelé peu après à devenir assesseur du doyen de l’époque, Gilbert Orsoni, il sera amené à prendre en charge le site Marseille-Canebière, qui marquera le début son engagement dans des fonctions de responsabilités. N’ayant par ailleurs jamais abandonné la recherche, il se penchait encore il y a très peu de temps, dans le cadre d’un travail sur les transformations du droit de la famille, sur la question des droits de l’enfant, notamment en matière d’éducation, et en particulier sur les questions de l’innovation éducative et sociale. C’est fort de ce parcours et de sa maîtrise de l’écosystème de l’enseignement supérieur, que Jean-Philippe Agresti aborde aujourd’hui ses nouvelles fonctions à la tête du rectorat de l’académie de Corse.
La volonté d’être un recteur de la proximité et du terrain
« La jeunesse est ma préoccupation ; je n’arrive pas dans un monde qui m’est totalement inconnu, même si je prends ces fonctions avec une grande humilité, explique-t-il, ce qui signifie être à l’écoute, comprendre, essayer de mesurer les enjeux, entendre tous les acteurs, concerter, pour prendre des décisions au plus près de la réalité et adapter au mieux la politique nationale aux particularités du territoire. »
Mais pour l’heure c’est sur fond de crise sanitaire que le nouveau recteur aura à conduire son action et ses priorités : « Je découvre des personnels pleinement engagés dans la crise, que je remercie tout particulièrement pour l’engagement qui est le leur, leur travail remarquable, leur investissement professionnel incomparable et l’énergie déployée ! C’est une force, en arrivant, de sentir qu’il y a cet engagement-là ! Mon objectif évidemment c’est de m’assurer que la santé des enfants et des personnels soit bien protégée par la mise en œuvre des protocoles dans les différentes écoles, collèges et lycées. Je veux aussi aller un maximum sur le terrain pour voir les équipes, à la fois pour bien prendre en compte les difficultés rencontrées mais aussi pour échanger sur les projets, car il est important que la crise n’écrase pas tout et que l’on puisse continuer à travailler sur des projets de fond. Il est très clair que les projets innovants, éducatifs, doivent se poursuivre. »
Tout cela avec une ligne directrice qui ne manquera pas de guider son action : l’élévation du niveau de chacun dans le souci de justice sociale visant par là même l’épanouissement de l’adulte en construction. « C’est quelque chose qui me touche personnellement. »
C’est avec cette noble vision du rôle que l’école doit jouer, que Jean-Philippe Agresti est aujourd’hui pleinement engagé au service de la jeunesse de Corse.
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