UNE RÉCENTE ÉTUDE DE L’INSEE DÉMONTRE QUE LES RÉFORMES SOCIALES ET FISCALES QUI ONT EU LIEU EN 2020 ET 2021 ONT AUGMENTÉ LE REVENU DISPONIBLE DES MÉNAGES DE 1,1%, SOIT UN GAIN MOYEN DE 280€ PAR AN ET PAR PERSONNE.
Par Emmanuelle de Gentili
Les plus modestes lésés
Ces réformes reposent sur des hausses pérennes: la baisse de l’impôt sur le revenu (IR), la suppression de la taxe d’habitation (TH) sur les résidences principales, les revalorisations du minimum vieillesse et l’extension de la garantie jeunes (stages, formations). Elles comportent aussi des aides exceptionnelles: 100 à 150€ pour les 4 millions de ménages les plus modestes, suivies d’un chèque énergie de 100 € en 2021 et d’une indemnité inflation équivalente, soit 300€ au total. L’étude évalue les conséquences budgétaires de ces réformes et leurs effets sur le revenu disponible (RD), c’est-à-dire le niveau de vie des ménages. Elles induisent une augmentation du niveau de vie allant jusqu’à 470 €/an en moyenne pour les personnes qui ont un revenu disponible annuel de 29 600 € (2 460€/mois), contre 90 € pour ceux qui ont moins de 18600€/an (1550€/mois). Le RD comprend les revenus d’activité (nets des cotisations sociales), les indemnités chômage, les retraites et pensions, les revenus fonciers et financiers et les prestations sociales reçues (prestations familiales, minima sociaux et prestations logements). Au total de ces ressources, on déduit les impôts directs (IR, TH) et les prélèvements sociaux (CSG, CRDS). Cette hausse profite plus à la moitié la plus aisée de la population, en raison des réformes pérennes que sont la baisse du barème de l’IR (la baisse est importante pour ceux qui le payent alors que les bas revenus en sont exonérés) et la suppression de la TH sur les résidences principales (fonction de la surface et du confort plus modeste chez les moins aisés).
L’Insee démontre ainsi que les réformes fiscales engagées dans la cadre de la politique du «quoi qu’il en coûte» et pour lutter contre les conséquences de la Covid ont rapporté davantage aux plus aisés qu’aux plus modestes. Ces effets vont s’amplifier car les mesures profitant aux plus aisés vont perdurer tandis que les mesures pour les plus modestes vont disparaître. L’étiquette de «président des riches» risque donc de coller encore à la peau du Président Macron, tel le sparadrap du capitaine Haddock. Il faut enfin revenir à la Corse où le niveau de vie est le plus faible du pays, après celui de la région Hauts-de-France, hors population des territoires d’outre-mer. En 2019, dans l’île, le niveau de vie annuel médian était de 20 950€ (soit 1 750€/mois). C’est-à-dire que 170000 personnes vivaient avec moins de 1750€ par mois de RD. Ils ont eu un revenu supplémentaire de 10€ par mois, donc pas de quoi modifier leur quotidien. Les classes moyennes (2 460 €/mois) y ont trouvé un très léger surplus de niveau de vie: 30€/mois. Il le sera un peu plus pour ceux qui sont au- dessus de ce RD mensuel, car les mesures concernant l’IR et la TH sont pérennes: près de 40€/mois.
Pas d’efficacité sociale
Évidemment les 1% de notre population qui vit avec un revenu supérieur ou égal à 108 700€, soit 9100€/mois pour une personne seule, ou 19020€ pour un couple avec deux enfants, ne se sentira pas concernée par ces mesures. (Source: Insee Flash n°50 de mai 2021). L’efficacité sociale de cette politique est donc quasiment nulle en Corse. L’efficacité économique globale est également limitée car la somme de 12,7 milliards d’€ (Mds €) injectée dans l’économie, mesures pérennes et exceptionnelles en 2020 et 2021, représente 280€/an et par personne, soit 7,8 millions d’€ (M€) pour l’île, à comparer aux 1 950 M€ du PEI. C’est un classique de la communication politique: un effet d’annonce fort et une efficacité sociale et économique faible, plus encore en Corse où la moitié de la population (dont 63 000 vivent sous le seuil de pauvreté) est en deçà du RD permettant le gain de 470€/an. Pendant ce temps, le fonctionnement et la situation financière des hôpitaux publics qui étaient difficiles (84 milliards d’€ de dépenses pour 82 de recettes) en 2019 avant la Covid, se sont aggravés. (Source: Les établissements de santé, édition 2021, DRESS).
Saupoudrage politique
Le coût de ces réformes leur aurait été plus profitable, car ils vivent, une crise sans précédent. Mais pour la «com», un saupoudrage politique tendant à prouver que l’on s’occupe des Français est plus porteur que la bonne santé des hôpitaux publics et la prise en charge des malades. Le «quoi qu’il en coûte», augmentant la dette publique, a donc eu une faible efficacité sociale et économique pour le pays et l’île.
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