Par Pascal Biancamaria/conseiller départemental d’Ajaccio V
La collectivité de Corse verra le jour le 1er janvier 2018. Elle prendra la place de la collectivité territoriale et des départements de Corse. Aucune élection ne pourra remettre en cause cette nouveauté institutionnelle. Les querelles politiciennes n’ont plus leur place car l’urgence est celle du travail. Actuellement, personne ne peut dire quelles seront les orientations politiques de cette « super-collectivité ». Les électeurs auront à choisir, en décembre prochain, une ambition, un projet de société et une majorité. Mais, d’ores et déjà, notre rôle d’élu est de faire en sorte que son organisation soit adaptée aux besoins et que puisse se concrétiser l’idée forte d’un pouvoir politique en mesure d’agir puissamment face aux défis à relever. Ceci étant, la collectivité de Corse ne peut s’improviser. Il faut anticiper pour éviter une paralysie qui impacterait notre économie. En effet, un travail approfondi doit être mené pour uniformiser les politiques publiques issues des compétences des deux départements car ceux-ci les exercent différemment. Demain, chacun doit pouvoir être considéré de la même manière et accéder aux mêmes droits.
Le social et le rural
L’enjeu est fondamental en matière sociale. Il ne peut y avoir de rupture d’égalité et les services devront être opérationnels dès le 1er janvier 2018. Le soutien à la dépendance (APA, PCH), l’aide aux personnes en recherche d’emploi, le FSL, et l’ensemble des autres dispositifs ne peuvent souffrir d’un quelconque retard. Des milliers de foyers en Corse sont concernés. C’est pourquoi, la continuité du service public, notamment du versement des soutiens financiers, doit être préparée afin de ne pas placer les plus démunis dans des situations de grande précarité.
Le soutien aux communes et à leurs groupement est lui aussi vital. Aujourd’hui, en combinant intervention de la CTC et du département, les communes et EPCI bénéficient d’un financement à hauteur de 80% de leurs projets. Avec une « super-collectivité », cette manne ne peut être réduite sauf à figer nos villages dans l’immobilisme et à abandonner la reconquête du rural et de notre montagne. À mon sens, dans un souci de justice, la future majorité devra prendre en compte de nombreux critères, mais elle ne peut faire l’impasse sur le besoin d’une aide forte en faveur des communes peu peuplées qui rencontrent déjà des difficultés dans l’élaboration des dossiers par rapport aux communes urbaines et péri-urbaines. Le taux d’intervention pourra être progressif en fonction de la richesse de la collectivité. Il faudra surtout une politique cohérente, fondée sur la territorialisation des services. Il serait vain de financer des gymnases ou des crèches dans toutes les communes. Les projets structurants et concertés devront être la clé de voûte de l’aide aux communes. Un effort de pédagogie est nécessaire voire indispensable et il doit débuter dès maintenant après des édiles. La même anticipation et le même esprit de justice et d’efficacité doivent permettre de réfléchir à un règlement d’aide aux associations fédérateur. Il s’agit de maintenir, en milieu rural prioritairement, un tissu associatif qui est source d’emploi et unique rempart contre la désertification et la disparition des services publics.
Le lien de proximité
La mise en place de la future collectivité ne doit pas bloquer la commande publique. L’investissement nécessaire et vital à l’économie locale ne doit pas subir de coup d’arrêt. Afin d’éviter cette rupture, la collectivité de Corse pourrait reprendre en priorité l’ensemble des marchés en cours signés par les deux conseils départementaux et par la CTC. Elle aura ensuite le temps de mettre en place sa politique d’investissement à la hauteur des enjeux de demain sans que notre économie n’en souffre. Quant au personnel, son sort doit être une priorité pour le futur exécutif. Il doit avoir l’assurance qu’il ne subira aucune mobilité forcée. Le découpage territorial actuel des départements devra être repris afin de ne pas briser ce lien de proximité avec cette population rurale de plus en plus éloigné des centres urbains. Bien des interrogations vont subsister. La Corse- du-Sud qui a une politique environnementale pointue avec son Plan départemental des itinéraires de promenades et de randonnées (PDIPR) qui gère et entretient 2000 km de sentiers alors que la Haute-Corse n’est pas présente dans ce domaine. Que faisons-nous le 1er janvier 2018 ? Allons-nous décliner ce plan au niveau régional et avec quels financements ou allons-nous l’abandonner faute de moyens financiers ?
Réussir pour la Corse
Pour chaque domaine d’intervention, des groupes de travail ont été mis en place afin de choisir un modèle qui permettra d’être opérationnel au 1er janvier 2018. Il faut que nous fassions confiance au travail de ces techniciens départementaux qui y siègent. La future majorité devra en tenir compte afin de mettre en place une organisation opérationnelle efficace. L’uniformité des compétences est l’enjeu majeur pour que chaque Corse soit traité de la même façon sur l’ensemble de notre île.
Il est encore temps pour réussir la collectivité unique, avec responsabilité, et ce dans le seul intérêt des Corses et de leur terre.
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