Najoua El Berrak est la consule générale du Maroc pour la Corse. Elle incarne certes la représentation de quelque quarante-trois mille ressortissants, tout en facilitant l’harmonie entre deux identités façonnées par l’histoire et qui s’unirent lors de farouches combats pour la libération de l’île. Passé et présent s’emmêlent pour cristalliser l’entente cordiale de l’avenir.
Par Jean Poletti
Un curriculum particulièrement riche. Des fonctions de haut niveau jalonnant sa carrière professionnelle, notamment dans des instances internationales qu’il s’agisse des Nations unies ou de l’Union européenne. L’intelligence l’empathie et le volontarisme au service d’une fonction. Tel peut être sommairement campé le portrait de Najoua El Berrak. Des qualités professionnelles que rehausse un supplément d’âme, lui permettant d’appréhender les problématiques insulaires, pour mieux cimenter le socle des deux communautés. Le crédo est tout à la fois simple et ambitieux. Par des actions factuelles ou d’envergure, la consule veut apporter sa contribution afin de formaliser davantage encore cette maxime des différences qui enrichissent, que l’on prête à Saint-Exupéry. Par des actions communes, des expériences partagées, ici une opération commerciale conjointe, là un ralliement qui renvoie au souvenir du sang versé ensemble contre les envahisseurs nazis et fascistes.
Naguère fil rouge du futur ? Qui en disconviendrait. Aussi, des projets ploient-ils sous le populaire slogan du gagnant-gagnant. Voilà finalement la feuille de route qu’a écrite et s’est assignée celle qui représente le Maroc dans l’île.
Cette implication qui à n’en point douter irrigue les rivages de l’intérêt général fonde dans un même creuset le propos et l’exemple. Le discours et la méthode. Les concepts et la réalisation.
Le salon du partage
Ainsi se dessine un mélange heureux qui assimile théorie et pratique qui ne peut qu’enregistrer écho favorable de l’unité respectant la diversité des identités.
Dans ce droit fil s’inscrit, entre autres, l’implication dans le projet d’un Salon du Maroc qui se déroulera à l’ombre tutélaire de la Citadelle de Bastia. L’office de tourisme de la communauté d’agglomération, que préside la dynamique Linda Piperi, en sera l’ordonnateur. Il verra notamment la participation de la région de Fès-Meknès, alliant spécialités culinaires, aspects culturels et animations diverses et variées. Un rendez-vous de l’amitié et des découvertes auquel la Chambre des Métiers et son président Jean-Charles Martinelli prêteront leur concours. À l’image sans doute de quelques artisans locaux de renom, qui de bonne grâce apporteront une efficiente présence.
Dans les multiples perspectives de Najoua El Berrak, figure en bonne place une collaboration entre l’université Pasquale Paoli et celles du Maroc. Loin d’être superfétatoire de tels ponts, jetés au-dessus de la Méditerranée, pourraient d’évidence mutualiser les connaissances culturelles. Mais aussi en incidence, littéraire, maritime et agricole. Au-delà de ce canevas, loin d’être exhaustif, il n’échappera à personne que le terme d’échanges fructueux se veut implicitement la toile de fond enveloppant tous ces éléments. Là est l’enjeu cardinal qui ne peut qu’être unanimement relevé.
Par le sang versé
L’avenir fréquemment s’irrigue du passé. À cet égard, la consule aspire à faire classer le site de Teghime par l’Unesco. À cet effet des réunions se tiennent avec la préfecture et la mairie. Passéisme ? Nullement. Mais la volonté légitime d’immortaliser, en le sacralisant, ce haut lieu où en première ligne goumiers et tabors, en symbiose avec des résistants corses, prirent d’assaut un lieu stratégique. Les combats furent sanglants, ils s’achevèrent à l’arme blanche, au corps à corps. Faut-il préciser que nombre de ces valeureux marocains reposent de l’éternel sommeil dans le cimetière de Bastia, veillés par certains de leurs descendants qui firent de l’île leur région d’adoption. Pour l’heure le souvenir est prégnant. En sera-t-il de même pour les futures générations sans un mémorial universellement reconnu ?
Créer un lien concret entre les deux territoires ? Cela est non seulement souhaitable mais également possible. D’où l’ouverture d’une ligne aérienne régulière au départ de Poretta.
D’une initiative, l’autre, la représentante du royaume chérifien s’affaire au quotidien dans le soutien de ses ressortissants domiciliés chez nous. Cela implique des démarches administratives pour accélérer les régularisations de situations parfois trop longtemps dans l’expectative. Ou qui peinent dans les méandres administratives à trouver des épilogues satisfaisants.
En corollaire l’idée de concrétiser l’ouverture d’ateliers au bénéfice de femmes et d’enfants fait son chemin. Et de manière plus pragmatique, celle de faciliter les bonnes conditions d’accueil et de séjour des deux mille saisonniers venant chaque année participer au ramassage des clémentines. Visites sur le terrain et rencontre avec les représentants d’agrumiculteurs sont gages de bonne coopération excluant hiatus et plausibles dissensions.
Au fronton du vivre ensemble
Sans conteste, la jeune diplomate aspire à préserver l’acquis tout en conférant un nouvel élan aux relations partagées entre deux cultures, certes affirmées, mais qui ne peuvent ni ne doivent alimenter le fléau de l’incompréhension. Cela n’est pas le cas. Gageons qu’il ne le soit jamais. En toute hypothèse, la jeune consule est tout à la fois sentinelle et actrice. Elle élabore patiemment les atours d’une authentique quiétude qui transcende les différences naturelles pour sceller dans l’espace et le temps le fameux vivre-ensemble. Fruit éclos sur deux rives d’une mer commune et unificatrice.
Les commentaires sont fermés, mais trackbacks Et les pingbacks sont ouverts.