6 mois après sa prise de fonction à la direction générale de l’Agence Régionale de Santé (ARS) de Corse, la crise sanitaire du Covid se déclarait, avec la mise en place inédite du 1er confinement qui l’accompagnait. Une période d’une intensité rare pour Marie Hélène Lecenne, en première ligne pour mettre en oeuvre localement les mesures gouvernementales de lutte contre cette pandémie.
Par Karine Casalta
Bien que préparée à la gestion de crise de par son parcours professionnel ce sont en effet des mois d’une intensité inouïe qui se sont enchainés pour la directrice de l’ARS au fil de l’évolution de la pandémie. Et une rude mise à l’épreuve malgré sa solide expérience de plus de 30 ans dans le domaine sanitaire et social. Marie-Hélène Lecenne a en effet débuté sa carrière en 1990 à la Direction Régionale des Affaires Sanitaires et Sociales (DRASS) de Picardie en qualité d’Inspectrice des affaires sanitaires. Elle rejoint par la suite la DRASS de la Réunion puis la Directions Départementales des Affaires Sanitaires et Sociales (DDASS) de Vendée où elle a exercé des fonctions d’encadrement supérieur, avant d’être nommée directrice de la DDASS de Lozère. Administratrice civile depuis 2009, chargée de mission auprès du Secrétariat général des ministères chargés des Affaires sociales jusqu’en 2011, elle rejoint alors le réseau des ARS, en charge de son animation tout d’abord, puis à différentes directions qui la conduiront de la délégation de Mayotte à l’ARS Auvergne -Rhône-Alpes avant d’arriver en Corse.
Au service du système de santé
« Dans mes fonctions, notamment en outre-mer, j’avais eu à gérer des crises, sanitaires à proprement parler touchant à l’eau, ou d’ordre social avec un impact sur le système de santé, mais une pandémie d’une telle ampleur était inattendue, tout le monde a été surpris. »
Sans compter qu’en tenant compte des spécificités du territoire, la gestion de la crise nécessitait une vigilance toute particulière, révélant par la même occasion toute l’importance du rôle de l’ARS dans la mise en place locale de la politique de santé.
« Ici en corse on a dû s’adapter, d’abord en raison de la distance, puis du fait que durant la 2e puis la 3e vague la PACA étant très impactée, nous n’avions plus de recours ! Nous avons donc dû travailler à être d’avantage autonome dans notre réponse hospitalière. Nous avons dû nous organiser pour pouvoir accueillir plus de patients. Dans cet objectif nous avons largement été soutenus par l’état en termes d’équipement et de logistique pour nous permettre de faire face à l’afflux de patients. L’inconnu que représentait cette épidémie ne manquant pas de rajouter de la difficulté à gestion de cette crise, il a fallu adapter les réponses au fur et à mesure des enseignements qui pouvaient en être tirés. Et là encore, il a fallu être très réactif » Et de souligner que l’ARS a pu compter sur la mobilisation de tous, y compris sur les élus locaux, les maires et l’exécutif, avec lesquels des actions collectives sur des champs de compétences partagés tel la protection des personnes âgées, ont été menées pour trouver les meilleures solutions.
Une solidarité exemplaire
« L’ARS n’a jamais été seule dans cette crise. D’une part nous avons pu bénéficier de l’étayage national pour prendre la mesure d’un certain nombre d’enjeux, et par ailleurs, ici en Corse la solidarité et la cohésion de tout le système de santé face à une telle crise a fortement joué. Très vite nous nous sommes mis en situation de consulter l’ensemble des professionnels de santé chaque semaine, dès le mois de mars 2020, – médecine de ville, système hospitalier, public, privé … – prenant en compte les contributions de l’ensemble des professionnels de l’île. C’est vraiment ce qui nous a permis d’adapter les mesures au contexte insulaire. Ça a été extrêmement précieux. Cela nous a permis aussi d’acquérir une manière de travailler, dans la transparence, dans la fluidité et de limiter l’impact de la crise sur la déprogrammation des soins, sur l’optimisation de ressources partagées, l’accueil des patients, etc… qui ont contribué à l’efficacité des réponses apportées. Sans compter l’équipe formidable qui m’entoure à l’ARS, qui a une connaissance fine des spécificités insulaires et a su ainsi favoriser ce travail de collaboration nous permettant de jouer toutes ces complémentarités. »
Une mobilisation extraordinaire de chacun qui a également permis à la Corse d’avoir une longueur d’avance dans la course à la vaccination. Cette solidarité a en effet permis de s’organiser pour être très tôt en capacité de vacciner les plus vulnérables jusqu’au cœur du territoire.
Une course de fond
Si la période traversée a été riche d’enseignements sur ce virus et les réponses à apporter, le constat est néanmoins établi que nous ne sommes pas à l’abris dans l’avenir de nouvelles vagues. Ce qui pourrait être le cas avec l’arrivée de nouveaux variants, à l’instar du variant Delta, durant l’été, dont la contagiosité galopante a été exacerbée par le brassage estival de population. Ce qui rend pour la directrice de l’ARS comme pour de nombreux experts la vaccination plus que jamais indispensable. « Nous sommes tous sensibilisés sur le fait que l’épidémie est toujours là et que nous devons garder des comportements adaptés. Par ailleurs après un fléchissement préoccupant, la relance très forte de la vaccination peut nous permettre de parer à cette quatrième vague et d’éviter d’avoir à gérer un impact trop important sur l’hôpital. En cela ces semaines de vaccinations gagnées sont primordiales » Et un nouveau défi pour l’ARS qui se doit aussi de trouver le juste équilibre entre de nouvelles mesures contraignantes à prendre pour contenir l’épidémie et l’économie de l’ile à préserver. Le chemin n’est pas aisé mais Marie-Hélène Lecenne se veut néanmoins optimiste.
Un optimisme encore renforcé par les enseignements tirés de cette crise
« La Corse a montré un bel exemple de solidarité, d’adaptation et de mobilisation générale. Cette conscience d’une responsabilité collective est réellement un élément de confiance réjouissant ».
Ce qui ne l’empêche pas toutefois de mesurer les conséquences pour l’avenir et réfléchir déjà sur les chantiers qu’il sera nécessaire de conduire par la suite : « Je suis une maman, et je mesure l’impact que cette épidémie peut avoir sur les plus jeunes. Cet impact sur les jeunes générations est à mon avis profond et va sans aucun doute nous demander des ressources et des adaptations indispensables pour les accompagner tout comme l’accent à porter sur la solidarité intergénérationnelle, que ce soit envers nos ainés ou en direction des plus jeunes »
Une prochaine mission que la directrice de l’ARS , fidèle à ses engagements, ne devrait pas manquer de se saisir à bras le corps.
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