Movember : La moustache utile

Chaque mois de novembre, ici et là, le poil se fait plus présent. Des hommes arborent fièrement une moustache, souvent nouvelle, parfois audacieuse, toujours travaillée. Un phénomène pas si étrange qui ne relève pas seulement d’une tendance, d’une vague nostalgie mais d’un symbole. Celui d’un mouvement international destiné à sensibiliser le public à la santé masculine : Movember.

Par caroline Ettori

Alors qu’Octobre Rose et sa campagne de sensibilisation au dépistage du cancer du sein s’achèvent, les moustaches commencent à fleurir sur les visages masculins.

Événement annuel qui se déroule tout au long du mois de novembre, Movember, mot valise associant Moustache et Novembre répond à un principe simple mais efficace, les hommes sont invités à se laisser pousser la moustache afin de susciter des conversations et lever des fonds pour des causes de santé masculines, principalement le cancer de la prostate, le cancer des testicules, la santé mentale et la prévention du suicide.

L’objectif est d’amener les hommes à parler de ces problèmes souvent tabous, en s’appuyant sur l’humour et la visibilité que peut offrir une moustache. Car derrière ce symbole se cachent des réalités préoccupantes. Par exemple, selon Santé Publique France, les cancers colorectaux et de la prostate sont les cancers responsables du plus grand nombre de décès chez l’homme, plus de 1 000 victimes en 2021 derrière le cancer du poumon avec 23 000 décès. Selon la Fondation Movember, ces cancers sont à l’origine de 75% des décès par suicide dans de nombreux pays. Movember s’engage donc à réduire de 25% le nombre de décès prématurés d’hommes d’ici 2030.

Aux origines du mouvement

L’aventure Movember débute en 2003, en Australie, grâce à deux amis, Travis Garone et Luke Slattery. L’idée leur est venue lors d’une discussion autour d’une bière, comme une blague visant à ramener la moustache à la mode. Inspirés par un ami dont la mère collectait des fonds pour la lutte contre le cancer du sein, ils se sont rapidement demandé pourquoi il n’existait pas d’équivalent pour la santé masculine. C’est ainsi que le premier Movember est né. Ce premier groupe, composé de 30 hommes moustachus, n’avait aucun objectif philanthropique. Mais dès l’année suivante, le concept a pris une dimension caritative : l’idée de collecter des fonds pour la lutte contre le cancer de la prostate a été lancée.

C’est alors que la Movember Foundation est créée en 2004. Très vite, le mouvement a gagné en popularité, avec des participants toujours plus nombreux et des soutiens venant de divers horizons. La moustache est devenue un symbole mondial, servant non seulement à lever des fonds, mais aussi à générer des discussions, souvent difficiles à aborder, sur la santé des hommes.

En 17 ans, Movember est devenu un acteur incontournable en matière de santé masculine. Aujourd’hui, l’organisation a financé plus de 1 250 projets dans le monde entier, permettant de faire avancer la recherche et les programmes de prévention.

Movember : un engouement croissant

Si Movember a vu le jour en Australie, son succès a très vite franchi les frontières. En France, c’est autour de 2012 que le phénomène a commencé à prendre de l’ampleur, grâce à l’implication de quelques pionniers et la couverture médiatique grandissante.

Le concept plaît particulièrement dans l’Hexagone. Movember a d’abord séduit les milieux étudiants et certains secteurs professionnels comme les bars et les entreprises technologiques, avant de toucher un public plus large.

Plusieurs événements sont aujourd’hui organisés dans tout le pays souvent dans un cadre convivial. Des courses à pied baptisées « Mo Runs », des soirées caritatives ou des challenges de moustaches dans les bureaux fleurissent chaque année, faisant de Movember un moment de solidarité nationale. À Paris, Lyon, Marseille ou Bordeaux, des rassemblements de « Mo Bros » et « Mo Sistas » pour les femmes soutenant le mouvement, permettent de mobiliser toujours plus de personnes autour de ces problématiques de santé.

L’évolution du mouvement en France s’explique également par l’appui d’entreprises et d’organisations françaises. Des marques comme L’Oréal ou encore des clubs sportifs ont rejoint le mouvement, lui apportant une visibilité médiatique conséquente. En 2018, le partenariat avec la Fédération Française de Rugby a marqué un tournant pour Movember en France. Le sport, vecteur de communication puissant, permet de toucher un public plus large et d’ancrer le mouvement dans le paysage médiatique français.

Les moustaches en chiffres

Movember France n’est peut-être pas encore aussi populaire qu’en Australie ou au Royaume-Uni, mais l’impact est bien réel. Depuis son lancement, des milliers de participants ont permis de récolter des millions d’euros. En 2022, plus de 3 millions d’euros ont été récoltés en France, un chiffre en constante progression.

La plateforme Movember France permet d’organiser et de suivre les dons, mais aussi de mettre en place des défis et des campagnes de sensibilisation. Par exemple, de nombreux clubs sportifs professionnels et amateurs lancent des défis entre leurs membres. L’idée est de créer une dynamique positive et ludique, tout en restant fidèle à la mission première : sensibiliser aux problématiques de santé qui touchent les hommes.

Une moustache pour briser les tabous

Le succès de Movember en France, comme ailleurs, réside dans sa capacité à rendre des sujets difficiles accessibles. La santé mentale, la prévention du suicide, le cancer sont souvent des sujets que les hommes, et la société en général, ont du mal à aborder. La moustache, avec sa touche d’autodérision et de convivialité, devient alors un moyen léger et décomplexé de parler de ces problèmes.

Si Movember est aujourd’hui bien implanté en France, le mouvement ne cesse d’évoluer et de s’adapter aux nouveaux défis de la santé masculine. La prévention du suicide, en particulier, devient une priorité au sein du mouvement, tant les chiffres sont alarmants. Movember multiplie les campagnes de sensibilisation, notamment auprès des jeunes hommes, pour les inciter à parler de leur mal-être et à rechercher de l’aide avant que les situations ne deviennent critiques.

Avec des défis toujours plus ambitieux et une communauté qui ne cesse de grandir, Movember en France s’impose comme un rendez-vous incontournable de l’automne, alliant humour et solidarité, pour une cause trop longtemps négligée.

En somme, la moustache de novembre, au-delà de son aspect visuel, est devenue le symbole d’une prise de conscience collective autour de la santé des hommes. Elle rappelle que chaque conversation entamée, chaque euro collecté peut faire la différence.

Taux de survie : des chiffres à la hausse

Ces dernières années, les progrès de la recherche ont permis d’améliorer la survie des personnes atteintes de nombreux cancers.

Pour la prostate, la survie est passée de 72% en 1990 à 93% en 2015, soit une augmentation de 21%.

Pour le cancer colorectal, le taux de survie est passé de 51% en 1990 à 63% en 2015 soit une augmentation de 12%.

Les fondamentaux : prévention et dépistage

Dépistage du cancer de la prostate :

80% des cancers sont diagnostiqués alors qu’ils sont encore localisés à la prostate. Le facteur pronostique majeur de ce cancer est le stade au diagnostic. Le test PSA (Prostate Specific Antigen ou antigène spécifique de la prostate) n’est pas assez fiable pour diagnostiquer un cancer, mais un taux élevé peut inciter à réaliser un examen complémentaire (un toucher rectal, par exemple) qui permettra de poser un diagnostic. Ce dernier peut également faire suite à un traitement chirurgical d’un adénome, c’est-à-dire une tumeur bénigne de la prostate.

Dépistage du cancer colorectal :

S’il est détecté tôt, le cancer colorectal se guérit dans 9 cas sur 10. Dépister ce cancer est désormais plus facile grâce au test immunologique. Il s’adresse aux femmes et aux hommes âgés de 50 à 74 ans, invités, tous les 2 ans, à réaliser un test simple.

La prévention :

En 2015, 21% des cancers colorectaux (hors cancers de l’anus) chez les plus de 30 ans sont directement liés à la consommation d’alcool. Plusieurs facteurs de risque modifiables en lien avec les comportements et habitudes de vie ont été identifiés : la consommation d’alcool et de tabac, la sédentarité, l’inactivité physique, le surpoids et l’obésité, une alimentation pauvre en fibres, mais riche en viande rouge ou en charcuteries.

Source : Institut national du cancer

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