Simone Guerrini : Une vie d’engagement et de passion au Service de la culture et de la politique

De l’Afrique à la Corse, en passant par la France métropolitaine et Tahiti, Simone Guerrini a mené une vie riche en expériences et en engagements. Aventurière dans l’âme, enseignante, attachée de presse, commerçante puis élue politique, elle s’est forgé un parcours marqué par la diversité et la passion. Son investissement dans la culture et la vie publique, en Corse, témoigne d’une volonté constante de bâtir, d’apprendre et de transmettre.

Par Anne-Catherine Mendez

Une enfance entre la Corse et l’Afrique : la construction d’un esprit libre

Née à Ajaccio, fille unique, gâtée et idolâtrée, Simone Guerrini grandit entre trois villages corses, Pila Canale, Urbalacone et Frasseto et découvre très jeune le culte de l’île. Mais son enfance bascule lorsqu’elle part vivre en Afrique occidentale, où ses parents travaillent. Là-bas, elle mène une vie extraordinaire et aventurière, au contact de la nature et des campements de chasse dans la brousse. À seulement 4 ans, elle vit des expériences hors du commun : safaris en jeep, immersion dans un univers sauvage, et même l’adoption d’un guépard. Ce cadre atypique forge sa personnalité : solitaire, observatrice et indépendante, elle apprend à composer avec un monde en perpétuel mouvement, tout en conservant un lien profond avec la Corse. À des milliers de kilomètres, elle entretient sa mémoire et sa culture insulaires, un attachement identitaire renforcé par l’éloignement, nourri d’un désir de retour et d’une idéalisation de sa terre natale, précieusement entretenus par son père. Elle assiste également aux grands événements de la décolonisation. Le 25 août 1958, à Conakry, elle est témoin de la visite du général De Gaulle, venu proposer un modèle d’autonomie aux États africains. Face à lui, Sékou Touré proclame : « Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage. » De Gaulle, offensé, répond sèchement : « L’indépendance est à la disposition de la Guinée… Elle en tirera les conséquences. » Un mois plus tard, la Guinée est le seul pays à rejeter le référendum constitutionnel. En représailles, la France retire son administration et coupe toute aide.

Un parcours scolaire et une carrière débutée sous le signe de l’aventure

Après cette enfance hors normes, elle rentre en France et intègre le lycée Michelet à Marseille. Élève studieuse, elle s’oriente vers un parcours scientifique et envisage d’étudier la pharmacie. Mais un nouvel appel de l’aventure la détourne de ce chemin : son père est muté à Tahiti et elle décide de le suivre. Là-bas, elle découvre une vie insouciante et festive, tout en donnant des cours dans des établissements catholiques etprotestants. Après quelques années, elle rentre en métropole, reprend des études et obtient son premier poste de professeure de mathématiques à Créteil. Mais ce retour en France est un choc : elle découvre une société différente de celle qu’elle imaginait, avec des élèves en difficulté et des méthodes éducatives qu’elle peine à accepter. Cette période la marque profondément et lui fait prendre conscience des réalités sociales françaises.

Retour en Afrique et expérience politique au plus haut niveau

Alors que son père prend sa retraite et devient directeur de la surveillance du territoiredu Gabon, Simone Guerrini décide de le rejoindre. Elle obtient un détachement de l’Éducation nationale et devient attachée de presse du président Bongo. À Libreville, une nouvelle facette de sa carrière s’ouvre à elle : la communication politique et diplomatique, de plus elle contribue à la création de la première chaîne présidentielle. Mais ce n’est plus l’Afrique de son enfance…

Un tournant vers la Corse et la vie politique

En 1979, elle décide de rentrer en Corse, marquée par la nostalgie et l’envie de s’engager sur sa terre natale. Elle achète un magasin de sport, La Hutte. C’est aussi cette année-là qu’elle rencontre, par hasard à un concert aux Milelli, l’homme qui deviendra son mari. En une semaine, ils se fiancent et se marient rapidement. À 38 ans, elle donne naissance à son premier fils, à 41 ans son second. Mais la politique la rattrape quand son père, ancien résistant, gaulliste, engagé politique et maire d’Urbalacone, décèdelui ouvrant les portes de la politique ; C’est ainsi qu’en 1996, elle devient conseillère municipale de son village et est élue maire. Elle découvre alors l’importance de la gestion locale, une véritable école qui lui permet d’affiner ses compétences.

Une montée en puissance dans la vie politique corse

En 1998, un tournant majeur survient lorsqu’elle est sollicitée par Jean Baggioni pour rejoindre sa liste aux élections territoriales. Elle accepte, est élue, et devient vice-présidente de la commission de la culture, s’investissant pleinement dans cette collectivité aux compétences variées. Durant son mandat, elle assiste à un moment historique : les pourparlers aboutissant aux accords de Matignon. Ces six années d’engagement constituent pour elle une aventure politique intense et passionnante. En 2004, lors des élections territoriales, elle est élue Conseillère Exécutive en charge du patrimoine, de la culture et de l’audiovisuel, donnant une nouvelle dimension à son action. Elle pilote alors la décentralisation culturelle, conséquence de la loi de 2002, et présente à l’Assemblée une politique culturelle et patrimoniale pour la Corse, accompagnée d’un règlement des aides dédiées. Travaillant aux côtés des acteurs culturels insulaires, elle contribue activement au développement des infrastructures culturelles. Convaincue et déterminée, elle demeure une femme de droite aux convictions fortes, mais son engagement dépasse les clivages politiques pour servir l’intérêt culturel de la Corse.

Élue à la Mairie d’Ajaccio et un combat pour la culture

Élue à la Mairie d’Ajaccio en 2008 dans l’opposition, elle s’attache à étayer ses critiques par des analyses précises, un réflexe sans doute lié à sa formation de mathématicienne. Élue à la Mairie d’Ajaccio depuis 2014, dans la majorité et au poste de 4e adjointe en charge de la culture, du patrimoine et de la lecture publique elle découvre l’ampleur du travail à réaliser. Dès sa prise de fonction, elle s’attelle à la mise en œuvre des projets qu’elle avait identifiés comme prioritaires, avec pour objectif de structurer une politique culturelle plus ambitieuse pour la ville.

Des rêves, des contraintes et une vision du monde

Malgré toutes ces réalisations, Simone Guerrini garde des regrets, principalement liés aux contraintes budgétaires qui l’ont parfois forcée à revoir ses ambitions. « J’avais des rêves, mais il a fallu devenir réaliste. » Pourtant, elle espère avoir fait des choses « qui resteront et qui sont utiles ». Sur le plan personnel, elle est fière de ses deux fils, fière de son travail au service du bien public, mais elle confie ne pas savoir être fière d’elle-même. « Ce serait faire un péché d’orgueil. » Elle se définit avant tout par son engagement et sa droiture. Sa devise : « Ne jamais avoir à s’excuser. » Il ne faut pas avoir de réaction épidermique, il faut réfléchir, pouvoir marcher tête haute. Et lorsqu’on l’interroge sur son rapport au féminisme, sa réponse est claire : « Je n’ai jamais exercé mes fonctions en me limitant à mon genre. Mon engagement prime avant tout, sans distinction entre hommes et femmes. Je ne me revendique pas féministe, mais simplement comme une femme impliquée. »

Une femme d’engagement et de passion

Tout au long de sa vie, Simone Guerrini s’est illustrée par son énergie, son engagement et sa volonté de construire. De l’Afrique à la Corse, de l’enseignement à la politique, elle a toujours abordé chaque étape avec implication et passion. Son parcours est celui d’une femme qui n’a jamais cessé d’apprendre, de s’adapter et de servir le bien commun. Une femme de convictions, mais aussi une femme de terrain, Simone Guerrini a toujours placé l’action et la transmission au cœur de son engagement. Attachée au travail collectif, elle rappelle que chaque projet mené est avant tout une aventure partagée : « Seule, je ne peux rien accomplir sans des équipes aussi investies et passionnées que moi. » Une vision qui reflète son approche humaine et fédératrice, où la culture et le patrimoine se développent à travers l’échange et l’engagement collectif.

Ajaccio, une ville en pleine renaissance culturelle

Depuis plusieurs années, la ville d’Ajaccio s’impose comme un véritable pôle culturel, où patrimoine, création artistique et transmission se conjuguent pour offrir une offre riche et accessible à tous. Sous l’impulsion de Simone Guerrini, adjointe à la culture, de nombreux projets d’envergure ont vu le jour, transformant durablement le paysage culturel de la cité impériale.

Parmi les projets majeurs portés par la municipalité, la Cité de la Musique s’annonce comme un espace unique dédié à la création et à la transmission. Bien plus qu’un simple Conservatoire, ce lieu innovant accueillera un centre de musique numérique, un espace consacré à la musique insulaire avec la phonothèque de Corse ainsi qu’un auditorium de 200 places doté d’une acoustique et d’équipements scéniques de haute qualité. Ce projet offrira aux jeunes, aux amateurs comme aux professionnels, un lieu où apprendre, créer, s’entraîner, enregistrer et innover. « Nous voulons participer à l’épanouissement de notre jeunesse en renforçant l’éducation artistique, car elle est une clé essentielle d’accès aux savoirs », explique Simone Guerrini.

La ville d’Ajaccio a récemment obtenu le label national « 100% Éducation Artistique et Culturelle », un engagement fort en faveur de la démocratisation culturelle. Ce dispositif garantit l’accès des enfants, de la crèche au lycée, à un véritable cursus structuré en arts plastiques, théâtre, musique, cinéma et patrimoine. Parallèlement, la municipalité a enrichi l’offre culturelle avec une programmation plus diversifiée à l’Espace Diamant, désormais salle conventionnée pour le jeune public, et une augmentation du nombre de spectacles au Théâtre de l’Empire. Portée par Michel Marti, cette collaboration public/privé permet à la ville d’avoir un plateau technique et une jauge à la mesure des exigences des spectacles d’aujourd’hui en attendant l’ouverture d’un nouveau théâtre. 

La municipalité a également fait de la préservation du patrimoine une priorité. Labellisée « Ville d’Art et d’Histoire », Ajaccio a initié une vaste campagne de restauration de sa statuaire et lancé plusieurs projets visant à valoriser son histoire et son urbanisme. Le Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine (CIAP) a été créé pour offrir aux visiteurs une lecture approfondie de l’évolution architecturale et historique de la ville. L’Antiquarium, dont l’ouverture est prévue en 2025, viendra compléter cette offre en proposant un espace muséal équipé des dernières technologies pour présenter les vestiges paléochrétiens d’Ajaccio. Dans cette même dynamique, la Citadelle sera transformée en un espace dédié aux arts visuels, avec notamment la réhabilitation de la Poudrière en galerie d’exposition d’art contemporain.

Consciente du rôle économique de la culture, Simone Guerrini a également œuvré pour faire d’Ajaccio une ville de tournage, attirant ainsi des productions cinématographiques et renforçant son rayonnement à l’échelle nationale. Son engagement en faveur de la création artistique s’est également traduit par l’initiation de plusieurs festivals. Le festival « Cria in Liberta » met en lumière le théâtre amateur, tandis qu’un festival de cinéma a été développé dans les écoles de quartier afin de sensibiliser les jeunes à l’image et au septième art. La ville a aussi mis en place les initiatives « Jardin d’été » et « Jardin d’hiver » pour soutenir la création en arts plastiques, ainsi que des résidences d’artistes tout au long de l’année afin de favoriser l’émergence de nouveaux talents insulaires.

La lecture publique a également fait l’objet d’une attention particulière. La ville d’Ajaccio a renforcé son réseau de bibliothèques et médiathèques, avec des programmes adaptés à tous les publics, y compris les publics empêchés. Une nouvelle médiathèque a ouvert rue des Trois-Maries, en remplacement de celle de Sampiero, et la bibliothèque patrimoniale a bénéficié d’une restauration complète ainsi que d’une campagne de numérisation de ses ouvrages anciens. Durant les travaux, des expositions virtuelles ont été mises en place pour maintenir l’accès aux collections. Une « Micro-Folie » a également été inaugurée pour offrir aux Ajacciens un accès numérique aux grandes œuvres du patrimoine mondial. À la Citadelle, des événements tels que « La Nuit de la Lecture » en janvier et « Les Médias et la Caricature » en mars viennent enrichir cette dynamique.

Enfin, pour rendre la culture encore plus accessible, la municipalité a lancé un bibliobus qui dessert l’ensemble des quartiers d’Ajaccio, facilitant ainsi la lecture publique pour tous. Grâce à cette politique culturelle ambitieuse, Ajaccio s’affirme aujourd’hui comme une ville où histoire, création et transmission se rejoignent, faisant de la culture un véritable levier de développement, de cohésion sociale et de rayonnement pour la cité impériale.

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