VOUS REPRENDREZ BIEN UN PEU DE BROCCIU AU DESSERT ?


Humeur

Par Nathalie Coulon

À ma question : « Cumu ti chjami ? »
« Je parle pas corsica, moi ! » me répondit-il ? 
Et son camarade trouvant même la solution de facilité selon lui :
« On pourrait parler anglais peut-être ? »
Nous ne sommes pourtant pas dans le Val d’Oise ou encore moins à Sheffield mais bien dans le Centre Corse et mieux encore en immersion, ces petits viennent de tous les coins de Corse. Ils sont corses ou pas, vivant ici depuis toujours ou quelques années déjà ! 
Peu d’entre eux connaissent le goût du brocciu, sa saveur, sa texture et qui le fabrique ?
Me voilà bien interrogative et triste ! La Corse, terre des bergers. Faut-il éduquer au goût, aux traditions, au savoir-faire pour continuer à valoriser l’être humain et sa terre ? 
Telle n’est pas ma stupéfaction un peu naïve aussi devant ce groupe de jeunes lycéens marseillais sans accent même pas un petit air de Bonne Mère qui aurait flotté dans le maquis corse, Oh ! Peuchère !
Mais qu’est-ce donc ce syndrome du non-accent ? 
Je n’allais pas en rester là. 
Et me voilà en quête d’informations et après quelques articles parcourus je m’intéresse donc à la glottophobie. D’après le dictionnaire Le Robert, la glottophobie en didactique est une discrimination basée sur certains traits linguistiques, notamment les accents.
Hum ! 
L’être humain n’est pas un animal comme les autres. Grâce au langage, il coopère et se hisse au-dessus de la masse. La langue est un formidable outil d’intégration.
Mais, c’est aussi une arme de domination. L’accent, le vocabulaire discriminent. C’est ce que les linguistes appellent la glottophobie. Philippe Blanchet, chercheur et professeur de sociolinguistique, part en guerre contre cette discrimination. Et moi aussi peut-être, soupir ! 
On finira par ne plus nous dire dans le métro parisien : 
« Ah ! Vous êtes corse, que c’est beau chez vous et cet accent… »
Notre ADN finalement. 
Ce monde si lisse, quel effarement ! 
Tout se perd mais à quel prix ?!!!
Rentrer dans le moule ? Ou pas ? 
Nos ancêtres les Gaulois. 
« Faut rigoler, faut rigoler », comme chantait si bien Henri Salvador. 
Formatés nous voilà donc formatés. 
Bon, sinon bientôt on rigolera moins il faudra payer ses impôts même si on déteste ça ! 
Se faire un body pour l’été : carotte, radis même si on préfère la tomme de brebis.
Prendre soin de son corps, prendre soin de son âme surtout s’il faut tirer jusqu’à 64 ans pour ses annuités. 
Rentrer tout doucement dans la belle saison, ça a du bon. On a aussi peut-être bien de la chance de pouvoir examiner, découvrir et relater certaines transformations, anecdotiques ou profondes, qui traversent notre époque. C’est ça aussi la chronique du changement, la lecture incertaine de l’avenir qui portent au pessimisme. Car à parler de crises à foison, de défis, dont on ne voit toujours pas bien comment on pourrait les relever, de situations, qui se dégradent, et d’acquis, que l’on brade. On risque (comme beaucoup en ce moment, je le sais) de se laisser transporter vers des continents d’inquiétude, de cynisme, d’apathie, de résignation.
Alors, comment conjurer ce pessimisme ? D’abord, en réaffirmant peut-être que le changement, quel qu’il soit, quelles que soient les transformations qui le travaillent, a toujours inquiété, angoissé, alarmé.
Après tout, rassurons-nous : il n’y aura pas de monde nouveau. Seulement un monde à venir.
Bon printemps à tous…

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